Contes de l’Alhambra, de Washington Irving
Quatrième de couverture :
Y en a pas !
Les Mille et une nuits espagnoles…
Difficile en effet de ne pas penser à « l’exotisme » des « Mille et Une Nuits » en lisant certaines des légendes liées à l’Alhambra rapportées ici par Washington Irving. On est clairement dans une sorte de passé mythifié, idéalisé, parfaitement intégré dans un courant romantique qui fleurissait un peu partout alors en Occident (le recueil est paru en 1832). On y trouve donc, dans une atmosphère bien particulière, chaleureuse, exotique, différentes légendes relatives à la période musulmane en Espagne et notamment bien sûr autour de la ville de Grenade et son palais de l’Alhambra, mais aussi à d’autres périodes plus ou moins récentes.
Astrologue bicentenaire plus malin que son seigneur, jeunes princesses à l’éblouissante beauté séquestrées par leur seigneur de père dans une tour du palais, prince sachant parler aux oiseaux à la recherche de l’âme sœur, généreux porteur d’eau devenu possesseur d’un immense trésor caché sous l’une des tours de l’Alhambra, légendaire armée maure attendant sous terre la reconquête de la forteresse, bijou permettant de revivre un passé disparu, trésor caché dans les murs du palais, on a là tous les ingrédients, à la fois dans l’ambiance et les éléments fantastiques, pour faire de ses récits les « Mille et Une Nuits espagnoles » (même s’il n’y a ni djinn ni ifrit).
Mais ces « Contes de l’Alhambra » ne sont pas qu’un recueil de légendes (parfois liées entre elles), ils sont aussi le récit d’un voyage, de tourisme presque, fait par Washington Irving lui-même alors qu’il est allé s’installer durant quelques mois à l’Alhambra. On y découvre donc de nombreuses considérations sur l’Espagne et ses paysages, ses habitants, etc… Tout cela sonne un peu cliché aujourd’hui mais donne au recueil un caractère assez singulier qui n’est pas désagréable, loin s’en faut, notamment quand l’auteur aborde la population qui vit alors dans ou aux abords du palais. Gens de peu pour l’essentiel, Irving parvient en peu de mots à les rendre extrêmement attachants, notamment Mateo Jiménez, gardien devenu plus ou moins son aide de camp zélé.
Irving n’oublie pas de décrire dans le détail le palais de l’Alhambra lui-même, sorte de personnage à part entière du recueil, détenteur de nombreux secrets que les légendes rapportées par l’auteur ne font qu’effleurer. Il faut être honnête et admettre que ces descriptions parfois proches du guide touristique ne prennent un vrai intérêt que quand on a visité le palais et que l’on visualise très clairement ce qu’Irving décrit. C’est évidemment mon cas, et j’ai pris là beaucoup de plaisir à cheminer à ses côtés, mais sans ce vécu personnel pas sûr que le lecteur lambda soit passionné par ces descriptions…
Et enfin le recueil propose également ici ou là quelques considérations plus générales sur la domination musulmane en Espagne et quelques éléments historiques sur certains des souverains du palais, mais aussi quelques anecdotes qu’il a vues de ses yeux, telle celle sur une jeune femme sur le point d’entrer dans les ordres ou encore sur un pigeon volage…
Tout cela fait de ce recueil un livre à la fois très particulier et assez complet, qui a sans doute le défaut d’explorer beaucoup de choses différentes et qui risque de peiner à passionner le lecteur du début à la fin, mais qui, quand on a comme moi le palais en tête, est une manière de prolonger la visite de ce site absolument merveilleux, portée par une écriture très élégante qui n’oublie pas quelques jolis traits d’humour ici ou là. Mission parfaitement accomplie !
Un dernier mot sur mon édition, dénichée en occasion. Joli petit livre relié avec photographies et gravures, aux éditions Club Everest (éditions espagnoles a priori), difficile de trouver des informations à son sujet : pas d’achevé d’imprimer (mais un dépôt légal en 2002 et la mention d’une onzième édition), pas d’indication sur les illustrations, couverture comprise (une petite recherche m’indique qu’il s’agit de gravures faites à partir de peintures de David Roberts) ni sur le traducteur (une lecture comparée avec une autre édition la rapproche de celle d’André Belamich mais il y a quelques différences…). Sans oublier un nombre incalculable de coquilles, fautes de français, etc… Bref, très jolie mais pas très rigoureuse…
« quoi de plus naturel (…) que d’y retourner par l’intermédiaire de Washington Irving » : je veux bien qualifier la démarche de naturelle, mais je ne suis pas sûr que ce livre en particulier soit le choix le plus évident. ^^ Tu l’avais déjà en PàL ou tu l’as acheté spécialement ?
Comme je sais que tu aimes bien avoir des « périodes », j’attends de voir ta lecture de « Les Lions d’Al-Rassan » de Guy Gavriel Kay maintenant.
Disons qu’il faut avouer qu’en matière de fiction sur l’Alhambra le choix n’est pas très vaste… ^^ Donc le plus évident, c’est bien possible. 😀
Je l’ai acheté spécialement, après mon retour en France. J’ai été tellement marqué par ce monument qu’il fallait que j’y retourne, d’une manière ou d’une autre. L’Alhambra c’est splendide, il n’y a pas de discussion possible. 😉
Et tu fais bien de parler de période, après avoir lu le résumé des « Lions d’Al-Rassan », le lien avec l’histoire espagnole et la période musulmane est en effet flagrant ! Il va falloir que je m’y mette. Bon, j’ai aussi, sur un autre thème, emprunté « Vei » à la médiathèque et c’est entièrement de ta faute. 😉
Pas lu,mais je le note. Peut-être chez Libretto éditeur.
Et l’auteur a une plaque commémorative, peut être l’avez vous remarqué, qui atteste qu’il a vécu à l’Alhambra.
C’est un voyage marquant en effet.
Oui l’édition la plus récente est chez Libretto.
J’avoue que je n’ai pas noté cette fameuse plaque lors de ma visite car il me semble que je ne suis pas passé dans ces pièces… Peut-être n’étaient-elles pas ouvertes à ce moment-là ? Je ne saurais dire…
En tout cas oui, c’est une visite qui m’a vraiment marqué. Tout simplement fabuleux.
Trop bien!! Je ne m’attendais pas à trouver Washington Irving ici. J’ignorais totalement qu’il avait écrit ce recueil, mais le concept ressemble fortement à celui du recueil est aujourd’hui vendu sous le nom « Sleepy Hollow » et qui se compose en grande partie de petits aperçus de la vie en Angleterre par un touriste américain.
Ouiiiii, lis Les lions d’Al-Rasan!! Je veux le lire aussi depuis des années et ta chronique m’aidera à me souvenir que je dois chercher à l’acheter!!!!
Comme quoi il faut s’attendre à tout ici ! 😀
Ça ressemble en effet pas mal à ce que tu décris, Washington Irving semble aimer ce style et il y est d’ailleurs assez à l’aise. Bon, il faut bien avouer que la vie anglaise, de base, me tente moins que des légendes hispano-musulmanes liées à l’Alhambra, mais bon pourquoi pas ! 😉
Attend, attend, je ne m’y suis pas encore mis… Faut pas être pressé avec moi. 😀