Symposium Inc, de Olivier Caruso
Quatrième de couverture :
Le jour de ses dix-huit ans, Rebecca Bertrand a commis l’irréparable. Au couteau. Dans un déferlement de violence rien moins qu’effroyable. Rebecca Bertrand, fille de Stéphane Bertrand, ce génie des neurosciences en passe de révolutionner la biotechnologie à l’échelle du monde avec sa firme Neurotech. Que s’est-il passé dans la tête de Rebecca pour se livrer à une telle atrocité ? Le jour de sa majorité ? Sur sa propre mère ? C’est tout l’enjeu du procès en passe de s’ouvrir, et ce qu’Amélie Lua, charismatique ténor du barreau, devra découvrir. Et vite, si elle veut éviter la perpétuité à sa cliente. Car déjà la vox populi des réseaux sociaux omniprésents a rendu son verdict… et quelque part, dans les secrets du cerveau malade d’une jeune femme, entre la pianiste assassinée, le scientifique révolutionnaire et l’avocate en quête d’absolu, patiemment, une araignée tisse sa toile…
L’homme est le passé de la femme
Entre anticipation proche, biotechnologies et thriller économico-technologique, « Symposium Inc. » pourrait être le pendant francophone de ce qu’écrit régulièrement, et avec succès la plupart du temps, Nancy Kress, d’autant qu’on est là sur la même longueur de texte que celle où l’autrice américaine s’exprime le mieux, à savoir la novella. Olivier Caruso, que l’on a déjà vu à l’oeuvre dans différents publications (par exemple les Bifrost 91 et 99), s’offre ici un passage réussi dans la fameuse collection « Une Heure-Lumière » avec ce récit très franco-français (tout se passe en France) qui mêle adroitement machinations avec quinze coups d’avance, questionnements éthiques, souvenirs sentimentaux anciens et drame familial.
La vengeance est un plat qui se mange froid, dit-on. « Symposium Inc. » illustre cet axiome en nous présentant ses personnages tous liés les uns aux autres, de diverses manières qui ont toutes leur importance. Stéphane Bernard d’une part, richissime neurobiologiste qui a révolutionné son secteur en mettant au point (et en les rendant disponible au plus grand nombre) des implants neuronaux permettant de mesurer en temps réel les constantes biochimiques (dopamine, sérotonine…). Sa fille, Rebecca, qui, précisément le jour de ses 18 ans, a assassiné sa mère Rose (épouse de Stéphane Bertrand donc), célèbre pianiste, et dont le procès ne va plus tarder à démarrer. Et Amélie Lua, redoutable avocate engagée par Stéphane Bertrand pour défendre sa fille et qui a bien connu Rose dans sa jeunesse, avant de perdre de vue la famille Bertrand à la naissance de Rebecca.
Un triangle narratif qui donne la voix à Stéphane et Amélie, en laissant volontairement en retrait Rebecca, qui n’a plus souvenir de ce qu’elle a fait. Tout tourne pourtant autour d’elle, les enjeux du texte tout autant que ce que les personnages portent en eux ou souhaitent. Et il y a les réseaux sociaux, élément « indispensable » (ou indissociable) de notre société, tout autant capables de vilipender ou de porter aux nues, en bref d’orienter l’opinion de la population. Amélie comme Stéphane en joueront, à leur bénéfice ou à leur perte, car on s’aperçoit vite que si les deux personnages luttent dans la même direction, les choses sont bien plus complexes que ça, et que la frontière est parfois mince entre vieille (et fausse) amitié et antagonisme…
Laissant longtemps le lecteur dans l’expectative quant aux personnages dont aucun n’est réellement aimable (au sens premier du terme), Olivier Caruso mène sa barque de belle manière, maintenant constamment la tension de son récit en usant de quelques rebondissements bien sentis, et malmenant le lecteur à plusieurs reprises en le mettant par exemple face à la crudité des réseaux sociaux. Science (sans conscience ?), éthique, questionnements juridiques, réseaux sociaux, manipulation des masses, on trouve là un cocktail digne de Nancy Kress comme dit plus haut, mais aussi de Greg Egan et Robert Jackson Bennett. Texte fondamentalement assez noir, « Symposium Inc. », au-delà de son ton (et de son sujet) assez déprimant, est une belle réussite qui se lit d’une traite (ou presque, car c’est un des plus longs textes de la collection UHL avec environ 170 pages).
Lire aussi les avis de Gromovar, Feyd-Rautha, le Chroniqueur, Yogo, Célindanaé, Ombre Bones, Vert, Yossarian, Laird Fumble, Aelinel, Boudicca, Stéphanie Chaptal…
Youhou ! *danse de la joie*
Par contre vous ferez attention Monsieur Lorhkan, ça ressemble beaucoup à une addiction cet enchaînement de lectures.
C’est un texte qui ne m’attire pas particulièrement, et la comparaison à Nancy Kress – qui ne fonctionne pas très bien avec moi – n’arrange rien. Mais comme je n’ai jamais lu l’auteur, je pourrais me laisser tenter un jour, par pur esprit de découverte.
Addiction, oui sans doute, mais la collection le mérite bien. Ils n’ont qu’à publier des trucs nuls, au Bélial’, aussi… 😀
Pas sûr que tu apprécies vraiment ce texte, pas franchement optimiste, pas franchement rempli de joie et de bonne humeur. Assez noir quoi. Et si en plus tu n’apprécies pas Nancy Kress (même si leur style reste différent)…
L’auteur a d’autres textes sur lesquels tu pourrais te pencher, avant de tenter celui-ci… 😉
J’ai été agréablement surpris par ce texte. J’ai toujours un petit a priori négatif avec les auteurs/autrices francophones de SH tendance Hard Science mais il y en a quand même certain.e.s qui sortent du lot et Olivier Caruso en fait partie.
Oui, agréable surprise aussi pour ma part. Enfin, « agréable », façon de parler vu ce que nous présente le texte… 😀
Il ne fait pas l’unanimité semble-t-il, mais je fais partie des (très) satisfaits. 😉
J’ai pas complètement accroché (c’était un peu trop sinistre à mon goût) mais l’univers était intéressant néanmoins.
Ah c’est sûr que ce n’est pas la joie… Mais oui, intéressant, questionnant et, oui, encore, effrayant aussi.