Zapping VOD, épisode 53
A couteaux tirés, de Rian Johnson
Sur les bons conseils de Li-An, j’ai jeté un oeil sur ce film qui met en scène une enquête qui doit beaucoup à Agatha Christie, dans un style (et à une époque) moderne même si les atours actuels du film auraient pu être transposés sans guère de difficultés à une époque plus « christienne ».
Le film est une franche réussite : casting flamboyant (Daniel Craig, Michael Shannon, Jamie Lee Curtis, Ana de Armas, Chris Evans, Toni Collette, Don Johnson, Christopher Plummer…), enquête roublarde, personnages parfois hauts en couleur… J’ai trouvé, en plus d’un hommage aux romans d’Agatha Christie avec ce qui commence comme une enquête en huis-clos dans un manoir tout ce qu’il y a de plus aristocratique, qu’il réutilisait aussi certains « trucs » d’une autre série policière célèbre, « Columbo », notamment avec cet enquêteur qui, au premier abord, paraît un peu lourdaud et pas très efficace, mais aussi avec une révélation un peu après la moitié du film, de laquelle je ne dirai évidemment rien ici.
En tout cas, c’est très efficace, très malin, et le plaisir pris par les acteurs transparaît à l’écran. La dernière partie du film est certes peut-être un peu trop explicative mais c’est sans doute la meilleure solution pour exposer les faits au spectateur sans que celui-ci ne se pose trop de questions sur une intrigue un peu tarabiscotée. Il n’empêche que le film mériterait une deuxième vision, histoire de s’assurer de la cohérence de l’ensemble. Chose que je ne ferai sans doute jamais… 😀 Faisons confiance au réalisateur et scénariste Rian Johnson (célèbre depuis « Star Wars VIII », mais qui m’avait surtout convaincu précédemment avec « Looper », film de SF pour lequel il signait également le scénario et qui se pose aussi là en terme d’intrigue bien retorse…). Quant à ceux qui n’ont pas vu le film, jetez-y un oeil, ça risque fort de vous plaire.
Tales from the loop, de Nathaniel Halpern
Cette série est une surprise. D’une part parce qu’en gros elle adapte des illustrations. Bon ok, je triche un peu, puisque le livre d’illustrations de l’artiste suédois dont est tirée la série (Simon Stålenhag) possède une légère histoire (que je ne connais pas) mais je doute que la série en ait tiré quelque chose… Si quelqu’un sait, qu’il se manifeste (mais j’ai prévu l’achat du livre, donc je serai fixé par moi-même bientôt). Et d’autre part parce qu’au delà de cette genèse un peu particulière, c’est une vraie réussite.
Constituée de 10 épisodes, la série est avant tout centrée sur les personnages et tient presque de l’anthologie. En effet, il n’y a pas vraiment de trame globale autre que ce qui arrive aux personnages, chaque épisode s’intéressant plus particulièrement à l’un d’entre eux, ceux-ci étant malgré tout plus ou moins liés, soit par des liens familiaux, soit par des liens amicaux, géographiques ou professionnels…
Tout se passe dans une petite ville des Etats-Unis, dans une monde type années 80 qui a vu une partie de la technologie prendre de l’avance sur notre époque (véhicule à sustentation magnétique, gadgets qui jouent avec le temps, gravité modifiée, robots, etc…) grâce à une installation scientifique mystérieuse située non loin de là.
Les « effets » SF montrés dans la série sont à la fois classiques et purement SF (manipulation du temps, changement de corps, monde parallèle…) mais ne sont à aucun moment justifiés ou expliqués, car ce qui importe ici, sur un mode très Robert Charles Wilson, c’est de placer des gens ordinaires face à des situations extraordinaires et de voir comment ils s’en débrouillent. L’être humain avant tout.
C’est une série « posée », qui prend son temps mais qui n’est pas lente pour autant, quand bien même ceux qui souhaiteraient un peu d’action en seraient pour leurs frais. Et elle est surtout très douce et bienveillante, avec bien évidemment une esthétique et un design absolument géniaux (via tous ces objets très marqués par l’époque dans laquelle la série prend place mais pourtant radicalement étranges et futuristes…) directement hérités des oeuvres de Simon Stålenhag (certaines scènes en sont tirées presque à l’identique). Si on ajoute à ça une superbe photographie et une bande originale signée Monsieur Philip Glass himself et Paul Leonard-Morgan de très grande classe et que j’écoute encore très régulièrement, on obtient une série à ne pas manquer. Excellent !
Invisible Man, de Leigh Whannel
Quoi ? Une nouvelle adaptation de « L’homme invisible » ? Quelle imagination à Hollywood ! C’est ce genre de remarque qui vient immédiatement à l’esprit. Parce que bon, on ne compte plus les adaptations plus ou moins directes du roman de H.G. Wells. Alors pour nous en resservir une nouvelle, il faut avoir quelque chose à dire. Et pour ce film-ci, la réponse est oui.
L’intrigue reste assez classique au fond, mais le contexte et ce qui sous-tend le film est plutôt explicite : il est ici question de harcèlement moral, de violence physique et psychologique, de pervers narcissique, de domination malsaine. Cette femme qui a peur de cet homme violent et dominateur et malfaisant, n’est qu’une illustration SF de ce que vivent de nombreuses femmes. La conclusion du film est d’ailleurs une manière d’enfoncer le clou et de bien montrer de quelle façon ces hommes sont des manipulateurs jouant sur la culpabilité des femmes qu’ils tentent de garder sous leur emprise.
Certes, la dernière partie du film devient un peu trop « déjà vue » dans le genre action, perdant un peu de la force de son message, mais ce serait un peu trop vite oublier tout ce qu’il a mis en place avant, avec une belle tension psychologique et la dérive du personnage incarné par Elisabeth Moss que personne ne croit (s’agissant de l’homme invisible dans le film / l’homme violent et manipulateur dans notre société). La prestation de cette dernière est d’ailleurs remarquable. Dommage que la mise en scène manque un peu de personnalité. Un film qui mérite malgré tout d’être vu. C’est dans l’air du temps, et c’est une bonne chose.
Je suis ravi d’avoir bon goût. Mais je n’ai pas dépassé l’épisode 4 de la Loop (et hésite du coup à le chroniquer). Ça ressemble beaucoup aux nouvelles SF que je lisais dans ma jeunesse et ça ne m’a pas emballé. Et en plus je déteste les mystères mystérieux qui expliquent tout sans être dévoilés dans les séries.
Hé oui, qui l’eût cru ? 😀
Pour Tales from the loop, il faut en effet prendre les « trucs SF » comme argent comptant, sans chercher à avoir des explication sur le pourquoi du comment. C’est ainsi, mais je comprends que ça puisse déranger. Ceci dit, ces « trucs » sont des éléments déclencheurs, mais pas des moteurs de l’intrigue. Ce sont les personnages eux-mêmes qui jouent ce rôle.
Mais bon, si ça ne passe pas, pas la peine de se forcer. Je dois avoir moins bon goût que toi. 😀
Je ne pense pas que ce soit un problème de goût (bon ou mauvais). Ça me rappelle des nouvelles de Sturgeon ou Asimov ou d’autre mais il manque un petit quelque chose.
Comparaison intéressante. Il y a du vrai, notamment pour Sturgeon (j’ai très peu lu Asimov) qui place toujours l’humain au centre de ses écrits. Et puis c’est vachement bien Sturgeon !
Mais bon, c’est vrai que si ça te paraît plus fade, il faut peut-être passer à autre chose d’autant qu’il n’y a pas réellement de « fin » autre qu’une certaine manière de boucler la boucle (forcément, avec la Loop…). Je trouve ça plutôt habile et délicat, mais je comprends qu’on puisse ne pas adhérer.
Merci pour la précision. Je me demandais justement s’il ne fallait pas persévérer des fois que l’histoire prenne une vraie ampleur au bout de quelques épisodes (un défaut des séries).
Invisible man a certes un thème classique mais comme tu le dis très bien, le sous-thème est passionnant. Invisible loop je n’ai pas encore décidé si je tente ma chance ou pas, je crains que ça soit trop mou pour moi.
Et donc, quelques jours plus tard, tu as décidé de regarder cette excellente série qui prend son temps ou pas ?… 😀
À couteaux tirés est génial, en effet! Un très bon moment!
Invisible Man: la bande-annonce a suffi à me faire peur… 😀
Yep, « A couteaux tirés » est vraiment sympa.
« Invisible man » propose, notamment au début de l’invisibilité, quelques forts moments de tension, qui tirent leur essence du sous-thème de la femme battue. C’est assez effrayant.
Tales from the loop est dans ma liste à regarder mais j’attends d’avoir un peu plus d’attention le soir pour. Et j’espère bien regarder A couteaux tirés un jour ^^
Dans les deux cas il faut de l’attention. 😀 Mais dans les deux cas ça vaut le coup de patienter d’avoir l’esprit disponible. 😉