Thin air, de Richard Morgan
Quatrième de couverture :
Hakan Veil est un ex-agent de sécurité haut de gamme, dont le corps équipé de technologies militaires fait de lui une véritable machine à tuer. Ses anciens employeurs l’ont abandonné sur une planète Mars troublée, où les institutions terriennes se battent pour l’argent et le pouvoir sur fond de luttes d’indépendance. Mais Veil rêve de retourner sur Terre – ce que lui offrent les autorités terriennes, s’il accepte d’assurer la protection de l’une de leurs employées. Une mission facile pour un expert comme lui… jusqu’à ce que tout bascule.
Lorsque sa cliente se met à enquêter sur la mystérieuse disparition d’un gagnant de la loterie, elle dévoile un nid d’intrigues et de meurtres. Veil reprend ces investigations à son compte, déterrant de terribles secrets enfouis sous la surface martienne. La machine à tuer devient alors la cible de puissants ennemis prêts à tout pour l’éliminer…
Embrouille politico-socio-économique sur Mars
« Thin air », dont le titre fait ouvertement référence à l’atmosphère très ténue de la planète rouge, se déroule donc sur Mars, environ trois siècles après le début de la colonisation. Mars qui n’est, une nouvelle fois, qu’une reproduction de tous les travers des sociétés basées sur la recherche du profit à tout prix : énormes écarts financiers entre les plus riches et les plus pauvres, corruption à presque tous les étages, esclavage moderne, billet de retour vers la Terre hors de prix, paix sociale plus que branlante mais qui tient plus ou moins malgré tout, crime organisé, mainmise économique (de manière plus ou moins discrète) de la nation-berceau (la Terre en l’occurrence) sur la société martienne, etc… Rien de très nouveau sous le faible soleil reçu sur Mars.
C’est dans ce contexte que nous faisons la connaissance de Hakan Veil, ancien agent de sécurité « amélioré » (biologiquement et cybernétiquement avec notamment une IA d’assistance nommée Osiris), licencié par son employeur à l’issue d’une intervention qui a mal tourné, et envoyé sur Mars sans grand espoir de pouvoir rejoindre la Terre un jour. Il vivote de petits boulots, en chasseur de primes, retrouvant des « qualpros » (professionnels qualifiés, les travailleurs envoyés sur Mars par leur employeur terrien pour quelques années, motivés par un gros salaire mais qui finissent par craquer sous la pression engendrée par cette planète à la terraformation inachevée, à la fois si proche et si éloignée de la Terre), ce qui lui permet de payer son loyer. Un loyer qu’il doit prévoir à l’avance puisque sa constitution, modifiée depuis son plus jeune âge, l’oblige à entrer en « hibernation » quatre mois par an, pour régénérer son métabolisme. Il a réussi, pour gérer cet inconvénient, à se procurer un petit module d’habitation armé jusqu’aux dents.
Et un beau jour (ça dépend pour qui…), la Terre, via la LINCOLN (l’Initiative Coloniale, vaste entité à mi chemin entre une administration et une entreprise aux dents longues, et par qui passe tout ce qui concerne la colonisation spatiale, notamment son aspect financier), décide de venir mettre son nez dans les affaires martiennes avec un audit de grande envergure, histoire de faire un peu le ménage dans la classe politico-économique martienne quelque peu corrompue. Et Hakan Veil, tout juste « réveillé », va se retrouver chargé de protéger l’un de ces auditeurs, en l’occurrence une femme, Madison Madekwe, dont le rôle est d’enquêter sur la disparition d’un homme qui a eu la chance d’obtenir un ticket de retour sur Terre via une grande loterie (les jeux, l’opium du peuple ? Ou en tout cas un maigre espoir qui fait vivre…).
Vous connaissez la suite : rien n’est simple, les apparences sont trompeuses, personne n’est ce qu’il semble être, les différentes factions martiennes ont toutes un agenda qui entre en conflit avec celui des autres, le truc derrière tout ça est bien plus énorme que ce que le début laisse présager, etc… Veil va devoir se débrouiller avec ce panier de crabes complexe (je ne vous ai pas parlé des Rocheux, désirant l’indépendance martienne, des Sacranistes, incarnant le socialisme martien, des triades chinoises qui ont elles aussi colonisé Mars de leur côté, ou bien des différents groupes intervenant dans l’intrigue, la police bien sûr, les Marshals aussi, ainsi qu’un paquet de personnalités telles le gouverneur de Mars, le préfet, etc…) mais remarquablement décrit par Richard Morgan qui a su garder une belle clarté dans une intrigue qui a pourtant largement le potentiel pour paumer son lecteur. Chose qui n’arrive jamais, et cela relève vraiment de la gageure vu le nombre de personnages et leurs buts qui ne cessent de se télescoper.
Bien sûr, en bon thriller-SF hard-boiled qui se respecte (Hakan Veil en parfait anti-héros, taciturne et n’hésitant pas à recourir à la violence, société sombre gangrenée par la corruption, scènes d’action bien musclées, scènes de sexe bien explicites, etc…), l’intrigue, digne héritière de celle des romans noirs, n’hésite pas à jouer sur les rebondissements et les faux-semblants mais toujours de manière limpide, sans jamais perdre le fil.
Et puis il y a ce concept de « Haute Frontière ». A travers elle, « Thin air » tient également du western futuriste avec ces Uplands, lieux éloignés de la capitale « civilisée » Bradbury (façon de parler, vous l’aurez compris), soit parce que l’orientation de la colonisation a changé en cours de route, soit parce qu’il s’ y trouve une forme de richesse possible (mais jamais pour ceux qui s’y tuent à la tâche bien sûr…). Des Uplands qui ont tout de la petite ville du Far West, celle qui voit le shérif local galérer avec les bandits venus faire leur loi. On y voit entre autre ce qui tient lieu de saloon, dans lequel le justicier solitaire peut mener son enquête en rencontrant la faune locale.
Alors disons-le très clairement, « Thin air » n’invente pas grand chose, il ne fait que marcher sur les traces de ses prédécesseurs, réutilisant une recette certes un peu éculée mais qui, menée de main de maître par un Richard Morgan en très grande forme, fait toujours mouche. Haletant, punchy, badass même, mais sans jamais oublier d’être malin, avec un worldbuilding aux petits oignons et un sous-texte politique loin d’être simpliste, le tout plongé dans une intrigue tortueuse à souhait et vraiment captivante, « Thin air » est une grande réussite. J’ai quand même un regret qui m’a poursuivi tout le long du roman, le choix de traduire le mot « headgear » (sorte de lunettes améliorées, permettant entre autre d’analyser le comportement de ses interlocuteurs, en plus d’être dotées d’autres fonctions diverses, sortes de Google Glass ++) par « lorgnon »… Le côté SF du roman en prend un sale coup… Au-delà de ça, même si « Thin air » ne sera sans doute pas à même de contenter tout le monde puisque mené à la première personne avec un protagoniste très… masculin dirons-nous (mais la plupart des femmes du roman n’ont rien à lui envier côté cojones), le récit saura pourtant sans aucun doute marquer le lecteur qui se laissera happer par son univers. Des thrillers SF-cyberpunk de cette trempe, on n’en rencontre pas tous les jours et celui-là, croyez-moi, il décoiffe et vaut son pesant de régolite martien !
Lire aussi les avis de Gromovar, Yogo, CultureVsNews, Artemus Dada (épisode 1, épisode 2…), Julien Fleury, Lauryn, Grigri_lit.
Critique écrite dans le cadre du challenge « Défi Cortex » de Lune (catégorie « Dans le système solaire mais pas sur Terre »).
Je n’ai pas été emballé plus que ça… de trop grosses ficelles et cela manque singulièrement de finesse. Mais j’ai bien aimé le background. Et ça devrait plaire au plus grand nombre…
Hé bien mpoi c’est un peu tout l’inverse, j’ai été complètement emballé. On peut considérer que ça manque de finesse, notamment parce que c’est parfois un peu « rentre dedans » (dans tous les sens du terme… 😀 ), mais je trouve pourtant que l’intrigue, même si elle garde des aspects assez classiques du thriller, est vraiment bien menée, notamment parce que jamais on ne perd le fil alors qu’il y a de quoi être vite paumés entre tous les persos qui ont tous des objectifs différents.
Un roman top pour moi.
Génial,notre futur (dans le meilleur des cas) bande de moutons de bordel de merde!!!
Une critique de l’extrême-gauche et l’extrême-droite que n’auraient pas renier Cioran ou Nietzsche!!!!
Mais un roman peut-êtrev trop difficile pour les QI à deux chiffres comme toi…
@yogo: tu ne comprends pas que ce mec est un visionnaire,t’es neuneu ou quoi???
Tu mélange Abercombrie,Phillip K-Dick et Nietzche et tu as…Richard Morgan!!!
Nonobstant les critiques des intelligences médiocres…
Oh un nouveau cyberpunk de Richard Morgan.
J’avais adoré les romans de Carbon modifié et n’avait pas été suffisamment convaincu par le premier tome de son incursion dans la fantasy.
Je note Thin Air pour une future lecture 🙂
haha je viens de voir que j’avais fait le même genre de commentaire chez gromovar il y a longtemps. Je vais devoir me dépêcher de le lire quand même…
On est tous dans ce cas-là : beaucoup de choses intéressantes mais pas assez de temps pour tout lire… 😀
En tout cas, comme toi je n’avais pas plus accroché que ça au premier volume de sa trilogie fantasy. Ici par contre, c’est vraiment top, du coup j’ai bien envie de lire la trilogie « Carbone modifié » et « Black man » (ce dernier étant dans le même univers que « Thin air »).
Et après avoir dit ça, je relis la première phrase de ce message… 😀
Je note. Je pense que ça pourrait me plaire, et celui-ci aurait l’avantage d’être un roman unique, contrairement à Carbone modifié qui est une trilogie.
Tout à fait, roman indépendant, c’est un avantage non négligeable, même s’il est assez touffu (plus de 600 pages). 😉
Bon on envoie des commentaires et il y a un bot programmé par un fils de pute qui censure!!!
Puisse toute sa famille crever du crabe dans les dix ans.
Amen.
Bah ben lu à cause de toi et, si j’ai failli aller jusqu’au bout, les scènes de cul m’ont rappelé avec une certaine nostalgie la grande époque de SAS. Autant dire que j’en suis resté un peu interloqué (ces gens ont des pulsions sexuelles très violentes) et ça m’a fait à chaque fois sortir de ma lecture. C’est plutôt bien ficelé mais je n’ai pas vraiment ressenti d’effet SF dépaysant. Et je n’ai pas terminé les vingt dernières pages parce que en fait je me fichais un peu de savoir si la Navy allait prendre le contrôle ou si le méchant méritait de mourir.
Ah c’est sûr que les scènes de sexe ne sont pas le meilleur atout du roman ! 😆
Le reste est en effet bien ficelé et l’intrigue, complexe mais claire malgré tout, m’a vraiment porté jusqu’au bout.
A 20 pages près, sur 600, tu exagères ! 😆
Je n’ai pas l’impression d’avoir loupé grand chose.
Sans doute que non, mais je me demande comment tu fais pour résister à la lecture des 20 dernières pages alors que tu en avais déjà lu 580 !… 😀
C’est la dernière scène de cul qui m’a fait décrocher. Il restait peut-être plus de vingt pages mais pas tant que ça.
[…] Lorhkan, Gromovar, Venez parler de Thin Air de Richard Morgan sur le fil dédié ! OmbreBones, Venez […]