Nuits cristallines, de Greg Egan

Dans le cadre du Projet Maki, me voilà qui me (re)frotte à Greg Egan, un auteur à la fois fascinant sur le plan des idées et un brin rébarbatif sur le plan du style. Plongeons donc dans un monde virtuel dont le rythme d’évolution a passé la surmultipliée…

 

Quatrième de couverture :

« Il était un créateur juste, mais pas omnipotent. Ses élagages circonspects représentaient la seule solution. » Daniel Cliff veut créer une IA de niveau humain, dans des buts rien moins qu’égoïstes. Mais quel est le moyen le plus éthique pour y parvenir ?

Avec « Nuits cristallines », nouvelle récompensée par le Prix des lecteurs de Bifrost 2015, Greg Egan donne son avis sur la question de l’intelligence artificielle…

 

Un monde dans un monde

Un riche patron, Daniel Cliff, a un rêve : développer une intelligence artificielle consciente. Un but lointain, tant la recherche avance à pas comptés. Mais Cliff a de larges ressources financières qui lui ont permis de développer un processeur optique très nettement plus puissant que tous les autres. Et avec ce processeur, il décide non pas de faire progresser la recherche fondamentale sur les intelligences artificielles mais plutôt de faire confiance à l’évolution en simulant un monde virtuel (et les créatures qui l’habitent) dont il peut modifier à loisir les paramètres, jusqu’à l’émergence d’une véritable conscience. Les créatures de ce monde vont donc évoluer à toute vitesse, en fonction des orientations dictées par Daniel Cliff, qu’elles soient plaisantes ou non. Quant à Cliff lui-même, son but n’est pas seulement purement scientifique…

Egan, hard-SF et IA, tel est le cocktail de « Nuits cristallines », nouvelle lauréate du Prix des lecteurs de Bifrost en 2015. Le résultat est, comme souvent avec l’auteur australien, à la fois de haute volée sur le plan des idées et assez peu consistant sur le style ou les personnages. Mais s’agissant d’une nouvelle, ce n’est pas bien grave d’autant qu’ici Egan se fait assez accessible même si la science infuse une grande partie du récit.

On a donc des IA « humanisées » puisque vivant dans un monde certes virtuel pour nous mais bien réel pour elles. Le récit s’intéresse ainsi autant à la science en elle-même (IA et évolution bien sûr, avec un monolithique clin d’oeil visible en couverture, mais aussi quelques débordements physiques et linguistiques) qu’aux dérives qu’une absence d’éthique peut amener. Daniel Cliff, à jouer à Dieu avec ces IA, risque d’ailleurs bien de s’en mordre les doigts… À la vitesse où évolue le monde virtuel que Cliff croit maîtriser, il suffirait de peu pour qu’il finisse par lui échapper totalement… Mais pour quel résultat ? Car parfois, d’un mal peut naître un bien, en tout cas pour un homme de son ambition…

Un nouvelle réussie donc, assez vertigineuse dans ce qu’elle présente malgré une froideur qui colle décidément à la plume d’Egan. Mais bon, la SF est une littérature d’idée, n’est-ce pas ? Et sur ce point, « Nuits cristallines » tape en plein dans le mille.

 

Lire aussi l’avis de Feyd Rautha, Philémont, O comme Colomb.

Critique écrite dans le cadre du challenge « Le Projet Maki » de Yogo.

 

  
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