The Witcher, saison 1
S’il y avait bien une série qui était attendue au tournant en fin d’année 2019, c’était « The Witcher », l’adaptation de Netflix des romans de l’auteur polonais Andrzej Sapkowski. Une adaptation qui, au fil des images et des trailers dévoilés en amont de la diffusion, avait soufflé le chaud et le froid. J’avoue ne pas avoir suivi de très près la campagne de communication de Netflix, donc je ne saurais pas me prononcer sur ce point mais au vu des réactions limites épidermiques de certains, de nombreuses craintes se faisaient sentir. Mais ces réactions étaient aussi la preuve des attentes autour de cette série, de nombreux spectateurs fans de fantasy et orphelins de « Game of Thrones » ne sachant plus vers quel saint se vouer…
Une adaptation très fidèle
Sur le fond, il faut saluer la volonté de la production, menée par Lauren Schmidt Hissrich, de coller le plus possible aux textes de Sapkowski. Pour ce qui est du background, je vais éviter de faire une redite et vous enjoins d’aller lire mes articles concernant les livres de la saga littéraire. Le show n’est certes pas une adaptation à la lettre près mais le fond est très proche, et on peut voir la série et les livres comme deux manières de raconter une seule et même histoire. Cette première saison pioche dans les nouvelles des deux premiers volumes, tout en épaississant l’histoire personnelle de certains d’entre eux (notamment Yennefer), à moins que cette histoire ne soit contée dans les tomes postérieurs au troisième (puisque j’en suis pour le moment à ce point de la saga). L’essentiel de la série est donc tiré de différentes nouvelles, quasiment une par épisode, avec en fil rouge le développement de deux personnages très importants (en plus de Geralt de Riv, le sorceleur) dans l’intrigue globale, Yennefer et Ciri, et quelques points de détail qui vont a priori au-delà du tome 3, ou bien modifiés/transformés pour les besoins du média télévisuel.
Une fidélité qui a ses défauts
Le revers de la médaille de cette fidélité basée sur des récits indépendants est une certaine confusion (voire une confusion certaine) dans la narration. Ni tout à fait procédurale, ni tout à fait feuilletonnante (ou plutôt un peu des deux à la fois), la série donne le sentiment de ne pas vraiment savoir sur quel pied danser. Autre problème, plus gênant encore : trois trames temporelles distinctes (une pour chaque personnage : Geralt, Yennefer et Ciri) se partagent l’écran, avec très peu d’indices pour que le spectateur s’en rende compte. Résultat : on s’y perd vite, d’autant que la série se doit également de présenter les forces en présence et l’échiquier géopolitique puisque c’est là que se situe le point important : l’invasion de Cintra et potentiellement des autres royaumes par l’empire de Nilfgaard. Quand on remet les choses en place, ça passe déjà beaucoup mieux mais à l’évidence (et je dis ça en connaissance de cause : ma moitié était régulièrement perdue…) les non-lecteurs de la saga risquent de galérer un peu…
Un casting qui fait débat
Parmi les points épineux de la série, relevé bien avant la diffusion, se trouvait le casting. Qui en a surpris (et inquiété) plus d’un. Tout d’abord Henry Cavill. Bien sûr, Cavill n’est pas le sorceleur des jeux vidéo (jeux vidéo qui, rappelons-le, n’adaptaient pas les livres mais se passaient après ceux-ci). Mais peut-être que le sorceleur des jeux vidéo n’est pas non plus le sorceleur des livres… Peu importe. Cavill est-il bien dans son rôle ? La réponse est oui… la plupart du temps. Oui ses marmonnements peuvent lasser (il est vrai qu’en roman on ne les entend pas), oui parfois sa belle gueule n’est pas assez « dark » pour le personnage, oui son regard (au-delà de sa couleur jaune particulière) a un petit quelque chose qui ne colle pas tout à fait, mais je préfère laisser la parole à l’auteur des romans lui-même :
Voilà qui a le mérite d’être clair.
D’autres choix ne font pas non plus l’unanimité. J’avoue que la Yennefer que j’ai imaginée n’est pas celle de la série. Je la voyais plus âgée, plus « femme » que « jeune femme ». Mais j’avoue aussi que l’actrice Anya Chalotra fait le job de belle manière. Triss Merigold (jouée par Anna Shaffer) aussi est transformée : la rousse flamboyante n’est plus, la voilà beaucoup plus « sage » et discrète. Ce sont des choix de production, des choix dont on pourra débattre éternellement. Mais des choix qui finissent par faire leur chemin dans l’esprit du spectateur, et les acteurs sont malgré tout convaincants (avec une mention pour Freya Allan qui incarne Ciri, alors que son rôle dans cette saison est pourtant réduit à une fuite constante).
Des thématiques bien présentes, sans lourdeur
La saga littéraire du sorceleur, très divertissante, n’oublie pas d’aborder des thématiques plus « sérieuses ». La série, vu sa fidélité aux textes, aurait eu mauvais goût de les avoir éludées. Ce n’est heureusement pas le cas, et on retrouve donc cette notion du « moindre mal » dès le premier épisode mais aussi, et c’est bien logique puisque cela fait partie intégrante du monde de « The Witcher », la colonisation et le racisme subis par les « anciens peuples » (les elfes notamment). On soulignera d’ailleurs le fait que de nombreux personnages issus de ces minorités opprimées sont des personnages racisés. Cela résonne forcément avec notre présent bien à nous…
Un budget qui n’est pas celui de « Game of Thrones »
Evidemment, qui dit série de fantasy dit « Game of Thrones ». La comparaison est pourtant injuste : d’une part ce sont deux types de fantasy bien différentes (plus de politique dans « Game of Thrones », plus de magie et de monstres dans « The Witcher » (la politique n’ayant ici pas (pas encore…) montré ses mauvais côtés…), ce qui conduit inévitablement à une sorte de snobisme injuste de la part de certains spectateurs), d’autre part les budgets sont sans doute bien différents. Et donc oui c’est vrai, les batailles de « The Witcher » ne sont pas spectaculaires comme pouvaient l’être celles de « Game of Thrones », il n’y a pas autant d’acteurs et de figurants, les effets spéciaux ne sont pas aussi réussis (sans que ce soit résolument catastrophique comme certains le crient, simplement parfois un peu trop voyants, dans le mauvais sens du terme), etc… Mais comparer « The Witcher » à « Game of Thrones » n’a pas lieu d’être : elles n’ont pas les mêmes prétentions, les même discours. Deux séries distinctes, la réussite de l’une, sur bien des plans, ne devant pas nécessairement éclipser l’autre qui ne réussit pas dans les mêmes domaines.
Car « The Witcher » a aussi des aspects plus réussis que GoT. Qui se souvient de combats à l’épée bien chorégraphiés dans GoT ? Pas moi. Plus réalistes peut-être côté GoT, mais tellement plus classes dans « The Witcher ».
C’est confus mais tout s’éclaire
La série navigue donc un peu à vue, avec des premiers épisodes pas tout à fait convaincants, à cause de sa narration confuse mais aussi tout simplement car certains sont presque ratés… Le deuxième épisode par exemple est à peu près incompréhensible… Pourtant, elle se bonifie au fil des épisodes, le temps pour le spectateur d’apprivoiser la narration et à travers elle, le monde de « The Witcher » et ses personnages. En jouant sur les styles (aaaaaah, cet épisode 3, qui donne en plein dans le style horrifique…) et sur les ambiances (on trouve régulièrement de superbes paysages naturels, y compris des paysages typés « montagnes désertiques » et c’est finalement assez rare en fantasy à l’écran), elle montre qu’elle est capable du meilleur. Et vient un moment, dans l’épisode 7 où tout se regroupe et où l’on comprend que la narration, malgré son manque de limpidité, n’était pas faite au hasard. Un très bel épisode, un modèle du genre même, pour ce qui est de la réunification des intrigues.
Verdict
C’est vrai, « The Witcher » est une série bardée de défauts. Qui peuvent d’ailleurs être rédhibitoires pour un certain nombre de spectateurs. Combien de non-lecteurs vont arrêter la série car ils n’y comprennent pas grand chose ? Un certain nombre sans doute. Combien ne vont pas accrocher à cette fantasy « pas très sérieuse » avec des magiciens qui font des sorts et des monstres dans tous les épisodes ? Un certain nombre peut-être. Et pourtant, la série est généreuse et à de quoi offrir un bon moment de fantasy parfois très dark (et violente), comme on n’en voit trop peu à l’écran. D’autant qu’encore une fois, elle ne peut pas et ne doit pas être jugée sur ses deux premiers épisodes, sans doute les moins bons de la saison. Alors c’est vrai que sa manière de narrer l’histoire est un peu curieux, voire même risqué, mais c’est une manière de faire finalement assez rare et plutôt culottée, ce qui mérite d’être salué en ces temps où tout est très maîtrisé, voire formaté. Cette saison 1 n’est à l’évidence qu’une vaste introduction (la scène finale le montre bien) pleine de défauts mais aussi régulièrement enthousiasmante. Largement de quoi attendre la saison 2 de pied ferme.
Super. Je suis contente de voir que ton avis est positif. Je te rejoins sur les critiques que tu fais, notamment le fait que l’épisode 2 est incompréhensible – j’en avais parlé sur le Discord tellement j’étais effarée. ^^ Pour l’instant, toutefois, ce qui me saoule vraiment, c’est la tendance des personnages féminins à se promener les seins à l’air et à tomber dans les bras de Geralt. 😀 Il me reste trois épisodes mais j’ai déjà hâte de voir la saison 2.
Ah oui, l’épisode 2… Pourtant super important concernant Yennefer, mais tellement mal expliqué/monté… Mal foutu quoi !
Il y a de la nudité c’est vrai, mais tu constateras qu’en ce qui concerne les personnages principaux, c’est 100% Yennefer ! 😀 En dehors de son personnage, je n’ai le souvenir que de son harem personnel, d’une prostituée et de l’illusion du magicien dans le premier épisode. GoT a parfois fait pire/plus il me semble. 😉
Quant à tomber dans les bras de Geralt, Yennefer encore une fois (mais c’est comme dans le roman, je t’aime moi non plus, leur relation est très conflictuelle en fait, c’est ce qui la rend intéressante d’ailleurs) et Renfri dans le premier épisode. Et une prostituée. Mais elle est payée pour, ça ne compte pas. 😀 Donc ce n’est pas systématique je trouve, la série a d’ailleurs semble-t-il fait l’impasse sur l’intérêt que porte Triss Merigold envers Geralt… 😉
Tu n’as donc pas encore vu l’excellent épisode 7, où tout se regroupe de belle manière. Vivement la saison 2, je confirme ! 😉
Ah Game of Thrones a fait pire si tu le dis, mais j’ai pas regardé donc je n’y pense pas 😀
J’ai aussi du mal à me remettre des lentilles des personnages, qui font parfois déguisement d’Halloween un peu trop voyant.
J’ai vu l’épisode 6, j’espère regarder le 7 ce soir et le 8 ce week-end, on en reparle. 🙂
Je crois justement que ce sont les lentilles de Henry Cavill qui ne conviennent pas tout à fait. En fonction des situations il y a truc qui me dérange, sans que j’arrive clairement à mettre le doigt dessus. Les yeux violets de Yennefer me dérangent moins, étant donné que… j’adore les yeux violets ! 😀 J’ai créé pas mal de persos de jeux vidéo/jeux de rôle (ou les deux en même temps) avec des yeux violets. 😉
Alors cet épisode 7 ? Un excellent moment de la saison pour moi. 😉
Oui, c’était super bien de voir les choses se nouer ainsi. J’ai enchaîné avec le dernier épisode, que j’ai beaucoup apprécié aussi malgré des problèmes dans la mise en scène de la bataille (le nombre de soldats m’a semblé fluctuant, par exemple – les hordes disparaissent de manière bien pratique quand on a besoin qu’un mage se balade sur le champ de bataille sans rencontrer personne). Je trouve toute cette structure assez osée au final: faire une saison entière en cachant une bonne partie des informations au spectateur, en séparant les trois personnages principaux et en ne donnant pratiquement aucune info sur les méchants et leurs motivations. 🙂 Bref, vivement la saison 2.
C’est dans cette bataille de l’épisode 8 qu’on voit clairement la différence de moyens entre le top-budget Got et The witcher, moins bien doté de ce côté-là.
Oui, la construction de cette saison 1 est osée, je suis tout à fait d’accord avec toi, surtout pour une saison 1 censée être faite pour attirer les spectateurs et les garder captifs pour les saisons suivantes. Il y a là un fort risque de rejet, mais c’est un parti paris audacieux, et rien que pour ça la série mérite d’être saluée.
Saison 2 pas avant fin 2020-début 2021, va falloir être patient… 🙁
Entièrement d’accord avec tout ce que je viens de lire 🙂
Hâte de voir la saison 2
Dans mes bras ! 😀
Je suis contente de lire ton avis que je partage. Je m’attendais à quelque chose de vraiment médiocre, mais au final je ressors plutôt enthousiaste 🙂
Avec des attentes, disons, « mesurées », ça doit en effet être tout de suite nettement plus sympathique. Non pas que la série soit mauvaise, ce n’est d’ailleurs absolument pas ce que je dis, mais c’est comme pour tout le reste : ne pas être hypé(e) est le plus sûr moyen de prendre du plaisir.
Et ça n’a rien de sexuel. Quoique ça marche peut-être aussi… 😀
Bon, j’avoue que je vais être peu objective, je n’ai vu qu’un épisode pour le moment (alors que je l’attendais depuis moult temps), je suis absolument fan du jeu vidéo et des bouquins, alors j’avoue que le premier épisode m’a un peu refroidie. Je trouve que tout est très fidèle, et en même temps je crois que mon véritable problème c’est ce Géralt à la fois trop… et pas assez…
Bon, tu m’as donné envie de continuer la série (ce que je comptais faire dans tous les cas, mais je voulais digérer le premier épisode qui ne m’a étonnamment pas vraiment emballée)
Dis-toi bien que tu as vu l’un des moins bons épisodes de la saison, l’autre étant le deuxième. 😀 Il faut donc passer cette étape pour voir si la série peut te convenir.
Je suis assez d’accord avec toi, j’ai aussi eu (et j’ai sans doute encore un peu…) du mal avec Henry Cavill en Geralt. Un petit quelque chose qui demande a être amélioré pour qu’il soit vraiment bien dans ce rôle, même si dans l’absolu il fait bien son job. Et on finit par s’y faire.
Mais encore une fois : ne te fie surtout pas aux deux premiers épisodes. Pour moi la sauce a commencé à prendre au troisième. 😉
Les livres sont très sympas, mais la série est foutraque; ce soit être mon grand âge, mais je trouve les personnages sont mal définis et les transitions entre les trames narratives ne sont pas super…L’acteur qui joue Geralt est très bien, je le voyais comme ça…
Quant au côté « famapoil », il y a eu pire (Spartacus !), le politiquement correct est vraiment partout…
Le gros point noir de cette saison c’est sa narration, loin d’être fluide (mais ça découle certainement de cette volonté de rester près des textes qui sont, du moins au départ, une succession de nouvelles) et parfois très obscure avec ces trois trames temporelles.
Mais tout devient limpide une fois les fils reliés. Je pense que la saison 2 sera bien meilleure sur ce point.
Pour ce qui est de la nudité, oui je pense aussi qu’il y a eu bien pire. Quant au politiquement correct, en liant cela à la nudité, il n’y a pas de raisons que ce soit toujours les femmes qui soient nues… 😉
Du coup, maintenant tu vas réussir à revenir sur ta visualisation personnelle des personnages pour le tome 4 ou tu ne verras plus que leurs adaptations télévisuelles ? ^^
Bonne question. Très bonne question. Très très bonne question.
L’avenir nous le dira, mais l’impact du visuel est indéniable. Il y en a qui arrivent à lire du Tolkien sans voir les personnages des films ? 😉
Beaucoup aimé cette première saison pour ma part. C’est très rafraichissant comme série, y’a un côté old school qu’on voit pas si souvent à la télé (les dernières occurrences qui me viennent en tête c’est les adaptations de l’Epée de vérité et de Shanara et bon… bref… voilà xD).
Du coup j’ai envie de lire les livres et de jouer au jeu vidéo, je suis foutue !
C’est un peu old school en effet, dans le sens ou la magie est clairement présente, idem avec les monstres. Bon, en fait, plutôt que old school, je dirais « classique », c’est moins péjoratif (même si je ne le ressens pas comme ça). 😉 Mais c’est un côté que j’apprécie, tout comme toi, ce n’est en effet pas si courant de voir ça à la télé, en tout cas pas avec cette qualité là (parce que c’est vrai que les exemples que tu donnes, même si je ne les ai pas vus, n’ont pas très bonne réputation… 😀 ).
Je n’ai pas joué aux jeux (j’aurais bien aimé mais je n’ai jamais eu la machine pour les faire tourner au moment où je m’y intéressais, et maintenant j’ai un problème de compatibilité, même avec les deux premiers), mais en revanche j’ai beaucoup aimé les trois premiers tomes. Le quatrième suivra prochainement… 😉