[anatèm] tome 2, de Neal Stephenson
Quatrième de couverture :
Fraa Erasmas est un jeune chercheur vivant dans la congrégation de Saunt-Edhar, un sanctuaire pour les mathématiciens et les philosophes. Depuis des siècles, autour du sanctuaire, les gouvernements et les cités n’ont eu de cesse de se développer et de s’effondrer. Par le passé, la congrégation a été ravagée trois fois par la violence de conflits armés. Méfiante vis-à-vis du monde extérieur, la communauté de Saunt-Edhar ne s’ouvre au monde qu’une fois tous les dix ans. C’est lors d’une de ces courtes périodes d’échanges avec l’extérieur qu’Erasmas se trouve confronté à une énigme astronomique qui n’engage rien de moins que la survie de toutes les congrégations. Ce mystère va l’obliger à quitter le sanctuaire pour vivre l’aventure de sa vie. Une quête qui lui permettra de découvrir Arbre, la planète sur laquelle il vit depuis toujours et dont il ignore quasiment tout.
La confirmation d’un grand roman
Oui parce que bon, on s’en souvient, le tome 1 avait certes fini par être véritablement passionnant, mais il était aussi quelque peu ardu, sinon plus. Les mondes mathique et saeculier, les fraas, les hiérarques, les férulaires, les concentes, les avôts, les auctions, et tout un vocabulaire qui demandait un certain temps d’adaptation au lecteur, d’autant plus que le glossaire, qui aurait pu s’avérer fort utile se retrouve relégué à la fin du tome 2… Un mal pour un bien peut-être puisque que pour me lancer dans la lecture de ce deuxième volume, trop longtemps après la lecture du premier, en plus de relire les derniers chapitres de celui-ci, j’ai parcouru ce fameux glossaire. Plutôt complet, il s’est avéré être d’une aide précieuse pour me remettre dans le bain de la planète Arbre et de son « écosystème » philosophico-scientifique (ou l’inverse) finalement pas si éloigné du nôtre, du moins sur le plan des idées.
Et donc, après un petit temps d’adaptation pour replacer les personnages et les évènements-clés du premier tome, j’ai replongé avec délice. Avec délice car la première grosse partie de ce tome 2 se trouve être centrée plutôt sur l’action et les révélations. Et ça s’avale goulûment. Puis vient une deuxième grosse partie. Ultra importante car préparant le lecteur, l’accompagnant même pour aborder avec lui ce qui fait le coeur du roman, ce vers quoi Neal Stephenson tend depuis le début. Sans en dire plus pour ne rien déflorer, je me contenterai de signaler que cette partie s’avère être tour à tour un peu longue et souvent passionnante. Parfois ardue (c’est même un bon cran au-dessus de ce que le tome 1 nous avait présenté) et obscure tout en étant fondamentalement hard-SF et hard-philosophie sans tout à fait avoir l’air de l’être. J’entends par là le fait que Neal Stephenson manie des idées assez vertigineuses sans les aborder sous un angle ouvertement technologique. Le roman est même plutôt low-tech d’ailleurs, non pas que la technologie ne soit pas présente, bien au contraire vu les évènements présentés, mais elle n’est absolument pas mise en avant. C’est d’ailleurs assez surprenant, voir même déstabilisant d’imaginer toute cette technologie et ces idées proprement vertigineuses être utilisées par des moines en robes de bure…
Mais ça fonctionne, et même plus que bien ! Et si on pourra se retrouver largué plus d’une fois par la complexité des thèmes évoqués (rendus encore plus difficiles à cerner par le fait que ces thèmes, connus sur notre monde à nous, sont abordés sous des appellations différentes sur la planète Arbre…), il faut se laisser porter et on finira toujours par raccrocher les wagons. Jusqu’à une troisième partie qui est une sorte de mise en application de ce qui a été vu auparavant, avec là aussi son lot d’action, d’émerveillement et de vertige, avant une conclusion qui rebat clairement les cartes entre les différentes factions de la société d’Arbre.
Ce tome 2 est donc une confirmation. La confirmation que « [anatèm] » est un roman hors-norme, une oeuvre comme on en voit rarement. Certes pas parfaite mais sans aucun doute essentielle. Sa manière de reprendre à son compte les sciences, l’histoire, la philosophie de notre monde et de mélanger tout ça (histoire de sciences, philosophie des sciences, histoire de la philosophie, etc…) en les adaptant sur un autre monde et son fonctionnement très différent du nôtre est un vrai tour de force. Neal Stephenson est à l’évidence un érudit qui n’hésite pas à prendre le risque de perdre son lecteur pour l’emmener vers des concepts proprement renversants. A l’évidence, « [anatèm] » ne pourra pas convenir à tout le monde, et s’y plonger est aussi prendre le risque de s’y perdre, mais ceux qui trouveront la clé de ce labyrinthe philosophique et scientifique seront largement récompensés pour l’effort déployé. Époustouflant.
Lire aussi les avis de Gromovar, Anudar, Lhisbei (sur les deux tomes), Lune (sur les deux tomes), Cédric (sur les deux tomes), Yogo, Apophis, Feyd Rautha, Blackwolf, Le Chroniqueur…
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