Défaillances systèmes, Journal d’un AssaSynth tome 1, de Martha Wells
Quatrième de couverture :
« J’aurais pu faire un carnage dès l’instant où j’ai piraté mon module superviseur ; en tout cas, si je n’avais pas découvert un accès au bouquet de chaînes de divertissement relayées par les satellites de la compagnie. 35 000 heures plus tard, aucun meurtre à signaler, mais, à vue de nez, un peu moins de 35 000 heures de films, de séries, de lectures, de jeux et de musique consommés. Comme impitoyable machine à tuer, on peut difficilement faire pire. »
Et quand notre androïde de sécurité met au jour un complot visant à éliminer les clients qu’il est censé protéger, il ne recule ni devant le sabotage ni devant l’assassinat ; il s’interpose même face au danger, quitte à y laisser des morceaux.
Martha Wells signe avec cette série un récit tout en ironie et en sensibilité sur l’éveil à la conscience et l’exercice du libre arbitre.
Défaillances systèmes, la première des quatre novellas qui forment « Journal d’un AssaSynth », a reçu les prix Hugo, Nebula, Alex et Locus.
L’émancipation d’un androïde
Oui, les trois plus fameux Prix de la SF (ainsi que le Prix Alex que je ne connaissais pas jusqu’ici et qui récompense chaque année dix roman adultes pouvant également plaire à des jeunes de douze à dix-huit ans, et qui a déjà récompensé les années précédents des auteurs comme Joe Abercrombie, Andy Weir, John Scalzi, N.K. Jemisin, Naomi Novik, Neil Gaiman et Patrick Rothfuss, entre autres) ont donc récompensé « Défaillances systèmes » de Martha Wells. Spoiler alert : c’est sans doute un peu exagéré. Mais la lecture s’est tout de même avérée plutôt fun. Pas si mal finalement. Le gros plus de cette novella (certaines mauvaises diraient même le seul…) est son personnage principal, un SecUnit, c’est à dire un androïde chargé d’assurer la sécurité des humains qui lui sont assignés par de grosses compagnies dont les intérêts sont en jeu, notamment durant des missions d’exploration planétaire comme c’est le cas dans ce récit. Point important, notre androïde a hacké son « module superviseur », celui qui l’empêche de quitter le droit chemin prôné par son employeur. Dès lors, il est libre de faire ce qui lui plaît. C’est évidemment une chose totalement interdite, il a donc fait ça à l’insu de tout le monde et continue d’assurer son job, de manière toutefois assez détachée, son seul intérêt étant de regarder de nombreuses séries télévisées qu’il télécharge régulièrement.
Dès lors, on suit la mission de cet androïde, une mission qui ne sera bien sûr pas de tout repos alors que les scientifiques qu’il est chargé de protéger sont attaqués par une bestiole souterraine sur une planète que tout les rapports indiquaient être sans danger particulier. Il s’avère rapidement que les rapports étaient tronqués, que des cartes géographiques étaient manquantes, et plus inquiétant encore, la deuxième équipe scientifique, de l’autre côté de cette planète en cours d’exploration avant une éventuelle exploitation commerciale, finit par ne plus communiquer…
S’en suit un récit où l’action prédomine, écrite efficacement ou disons plutôt « décrite » efficacement (comme le titre l’indique, il s’agit plus ou moins du journal de l’androïde) avec le ton très détaché et à la fois ironique de cet « AssaSynth » qui donne au texte une certaine saveur. Et heureusement car au fond, l’intrigue n’a rien de très originale, et on pourrait même dire qu’elle utilise un thème usé jusqu’à la moelle de la SF d’anticipation où l’ultra-capitalisme est roi. Pour autant, Martha Wells déroule son récit avec un savoir-faire certain, et le tout se lit avec plaisir. Novella oblige, le world-building reste assez limité (on espère le voir densifié au gré des novellas suivantes), mais l’autrice nous donne juste ce qu’il faut pour avoir un contexte suffisamment évocateur. Idem pour les personnages humains, tous plus ou moins interchangeables à l’exception de l’un d’entre eux, légèrement plus développé. Peu importe, l’essentiel est là : un groupe soudé, qui fait face à une situation pour laquelle il n’est pas préparé et à laquelle il doit faire face avec les moyens dont il dispose, avec en plus cet élément imprévisible qu’est l’AssaSynth.
Et en filigrane, Martha Wells pose la sempiternelle question de l’être humain et de comment le définir, l’acceptation de l’autre, le rapport à la différence, etc… Et même si c’est parfois décrit à gros trait, l’émancipation de l’androïde et l’évolution de son difficile rapport avec l’être humain (dû entre autres à une mission précédente au résultat… désastreux !) offrent un petit plus appréciable.
Le tout est donc très rythmé, sans temps mort, efficace, et même si le texte (traduit par Mathilde Montier, sous une belle couverture de Pierre Bourgerie que l’on croirait sortie des jeux vidéo « Halo » ou « Destiny ») ne peut pas prétendre entrer au panthéon de la SF, loin s’en faut, il permet de s’offrir une soirée d’évasion plutôt fun. Oui oui, ce n’est décidément pas si mal !
Lire aussi les avis de Gromovar, Yogo, Lianne, Apophis, Blackwolf, Kellen.
« Cher Monsieur Lorhkan,
Vous évoquez la sainte trinité des prix SF mais vous ne parlez pas du Prix Alex pourtant très joliment mis en avant sur ce somptueux bandeau rouge. Avez-vous quelque chose contre le Prix Alex ? Cherchez-vous à nous faire taire ? Est-ce une nouvelle preuve du complot ?
Cordialement, un représentant du prix Alex »
« Cher Monsieur Baroona,
Veuillez pardonner ce fâcheux oubli qui résulte de ma propension à systématiquement jeter les bandeaux des livres une fois ceux-ci achetés. Le cas présent n’a pas fait exception, et si j’ai bien retenu malgré tout les trois Prix les plus connus dans le milieu de la SF, le Prix Alex, inconnu de moi jusqu’alors, est passé à la trappe (quand bien même la couverture du livre est présente dans l’article, avec le bandeau).
Merci donc pour votre message qui me permet de me renseigner à son sujet et d’en faire mention dans mon article, comme de juste.
Cordialement, Monsieur Lorhkan »
« Cher Monsieur Lorhkan,
Nous avons eu écho d’une information concernant un bandeau rouge – voire plusieurs ? – qui aurait été maltraité en votre possession. Je tiens à vous faire part de notre profonde tristesse quant à cette nouvelle. Les bandeaux rouges sont des êtres sensibles qui ont des sentiments eux-aussi. Pourquoi leur voulez-vous du mal ? Pourquoi ne pas leur accorder le respect qu’ils méritent ?
Nous comptons sur vous pour vous reprendre en main et vous responsabiliser vis-à-vis de ces actes ignobles que sont les destructions de bandeaux rouges. Nous n’aimerions pas devoir intenter une action contre vous.
Cordialement, un représentant de la Ligue de Sauvegarde des Bandeaux Rouges. »
« Cher Monsieur Baroona,
Je pense que votre sentiment découle d’une maladresse de ma part. Par « systématiquement jeter les bandeaux », je voulais dire « respectueusement les déposer dans un récipient à l’utilisation adaptée à leur utilité ». Ne vous méprenez donc pas, je m’astreins à accorder à ces bandeaux toute la dignité qu’ils méritent, eu égard aux sentiments que j’ai à leur propos.
Soyez donc rassuré, et gardez vos hommes de loi pour des batailles nécessaires auprès d’autres personnes autrement moins scrupuleuses que moi. Elles sont malheureusement trop nombreuses. Les bandeaux rouges vaincront !
Cordialement, Monsieur Lorhkan »
Mouais, ça rejoint ce que j’ai pu lire à droite et à gauche sur ce bouquin. Je reste fort curieux et je me le prendrai sans aucun doute demain, en passant devant ma librairie favorite, après avoir ahané et pesté lors du déménagement d’un collègue. Ca me semble bien adapté pour laisser à mes muscles fourbus le temps de se remettre tout en ne sollicitant pas trop mon cerveau. Merci pour la critique Lorhkan !
Ton cerveau, que je sais être ultra-développé, pourra se mettre au repos le temps de cette sympathique aventure. Ce qui ne devrait pas t’empêcher de t’amuser.
Alors d’avance bonne lecture, bon déménagement aussi, fais gaffe à ton dos, n’oublie pas de prendre des gants, lave-toi les dents et souris à la dame. 😉
La couverture et le titre ne me donnent vraiment pas envie et ta chronique finit par planter le dernier clou. On a l’impression que c’est le public ado qui est visé (un âge que j’ai abandonné il y a fort longtemps).
C’est une couverture qui peut repousser, j’en suis conscient, même si elle tape dans ce genre de SF assez « rentre-dedans » qui j’aime bien. J’ai aussi été élevé avec Halo et ces grosses armures. Ça parle à mon petit coeur de geek. 😉
Ça semble bien sympa ce truc, une histoire de droïde, ça me tente pour le coup !
C’est sans prise de tête, ça va vite et c’est court, ça détend pendant deux heures, que demander de plus ? 😉
Nous sommes d’accord, ca ne révolutionne rien mais c’est très plaisant !
Le second opus sort le 20 juin et j’en serai 😉
J’en serai aussi, j’ai bien envie de voir l’évolution de notre AssaSynth. 😉
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