Olangar, Bans et barricades tome 2, de Clément Bouhélier
Quatrième de couverture :
À Olangar, le combat des nains a laissé des traces sanglantes dans le quartier portuaire. D’âpres négociations s’ensuivent tandis que les candidats à la Chancellerie multiplient les manœuvres politiques et les coups bas pour l’emporter. Pour mener à bien la lutte des ouvriers et contrer les agissements du clan de Malberg, le nain Baldek est obligé d’avancer masqué. Il entame un jeu dangereux avec ses ennemis directs, comme avec ses alliés les plus loyaux.
Pendant ce temps, loin de la capitale, Evyna et Torgend débarquent à Frontenac pour y trouver Stej Lombor, un ancien ami d’Andréan d’Enguerrand. Dans la chaleur étouffante et la cacophonie permanente de la Ville de Fer, la sœur meurtrie et l’elfe découvrent une vérité terrifiante. Séparés au gré des épreuves, confrontés aux plaines arides de l’oydimörk, ils sont forcés de nouer une alliance contre nature pour venger enfin le frère d’Evyna et mettre au jour le complot qui menace le royaume.
Fantasy sauce industrielle
Nous avions quitté Olangar en plein conflit (voire carrément en pleine guerre) social(e) à la fin du tome 1, nous le retrouvons ici dans le même état. Evyna tente toujours d’élucider les circonstances de la mort de son frère, aidée des elfes Torgend et Silja, tandis qu’à Olangar, les nains menés par Baldek sont sur la corde raide, dans une lutte des classes qui pourrait bien finir en bain de sang au-delà même de ce qui s’est déjà produit.. Le contexte n’a donc pas réellement changé, mais l’intrigue évolue sur un plan quelque peu différent. Là où le tome 1 se concentrait en majorité sur le conflit social des nains, ce tome 2 s’intéresse plus à la quête d’Evyna. C’est à la fois sa force et sa faiblesse. Sa force car ce déplacement de l’intrigue (sur le plan narratif comme géographique puisque nous découvrons Frontenac, construite sur une gigantesque chute d’eau, LA ville industrielle de cet univers, dans tout ce qu’elle a de plus terrible : travail constant et harassant, payé une misère, dans des conditions déplorables, ce diptyque « Olangar », c’est le « Germinal » de la fantasy !) renouvelle quelque peu l’action. Sa faiblesse car à un conflit social « palpitant » succède une quête somme toute plus classique et moins prenante, même si les deux intrigues sont bien évidemment liées.
C’est d’autant plus frappant qu’après un début tonitruant avec un paquet de révélations qui relancent la machine de la plus belle façon, le roman s’englue dans une baisse de rythme assez marquée, et qui laisse des traces. Et curieusement, quand la narration revient aux nains, c’est en ronronnant quelque peu. Car si le conflit armé cède la place à la diplomatie, les tractations, certes tendues, se déroulent finalement sans guère d’accrocs… Oui on a droit aux politiciens véreux, au chefs d’entreprise appâtés par le gain, aux syndicalistes revendicatifs, et pourtant tout ce petit monde semble s’entendre, même en se regardant en chiens de faïence, alors qu’on aurait pu s’attendre à des complots, des trahisons, des renversements de situation…
Ceci dit, ne crachons pas dans la soupe, « Olangar » sait se faire efficace quand il le faut, et Clément Bouhélier parvient à emballer son récit de fantasy, genre qui a parfois tendance à tourner en rond dès qu’on y loge des elfes et des nains, en le plaçant dans le genre de la « fantasy à mousquets » (encore peu représenté en France), en approfondissant ses personnages (notamment Torgend et son passé, et les elfes de manière générale) et en se montrant à la hauteur avec un final digne des meilleurs récits épiques (pas sur le nombre des protagonistes mais sur le plan de l’action). Ce dernier quart est une superbe réussite, à lire en retenant son souffle !
Alors certes, il reste quelques petits écueils narratifs, que cela soit dû à une certaine « facilité » (un passage en force durant la nuit, une nuit qui se fait claire ou obscure en fonction des besoins…), ou carrément à une erreur géographique (page 307, je cite : « Très loin au nord, deux autres voyageurs étaient sur le point d’atteindre le Mur. Eux n’avaient pas affronté les grandes plaines mais les forêts du Pradennad. ». Cette phrase fait référence à des voyageurs qui traversent les grandes plaines, et à d’autres, plus au nord donc, qui traversent les forêts du Pradennad. Sauf que sur la carte, les forêts du Pradennad sont bel et bien au sud des grandes plaines…). Mais on passe volontiers sur ces quelques détails pour ne retenir de « Olangar » que les bons côtés : un diptyque palpitant, qui manque peut-être un peu d’équilibre (le tome 1 me semble globalement supérieur au deuxième, mais le dernier acte de ce volume est vraiment enthousiasmant !) mais qui compense par un vrai souffle et une belle générosité dans un contexte original (et qui prend aussi ses sources dans d’autres oeuvres bien établies, je pense au Mur bien sûr (mais après tout, pourquoi penser au « Trône de fer » plutôt qu’à la Grande Muraille de Chine ?), mais aussi au peuple orc qui m’a fait penser plus d’une fois, et ce n’est sans doute pas un hasard, aux orcs de « World of Warcraft »…). L’auteur a pris du plaisir à écrire cette histoire, et cela se sent. Et cette fin tonitruante, je ne m’en remets toujours pas !
Lire aussi les avis de Célindanaé, Dup, Phooka, La dryade intersidérale.
« J’l’ai toujours dit ! Faut arrêter ces conneries de nord et de sud ! Une fois pour toute : le nord, selon comme on est tourné, ça change tout ! »
Ça confirme en tout cas qu’il me faudra le lire si j’en ai l’occasion !
Ah, le nord et le sud, c’est le bazar… Manquerait plus que des tuniques bleues, et ce serait le pompon ! 😀
En tout cas, n’hésite pas à le lire, sans être un chef d’oeuvre incontournable, c’est la garantie de passer un bon moment de fantasy industrielle ! 😉