Bertram le baladin, de Camille Leboulanger
Quatrième de couverture :
Il y avait un temps où l’on savait écrire, et surtout où l’on savait créer le plus miraculeux des matériaux : le papier. Cependant, le secret de sa fabrication s’est depuis longtemps perdu. Désormais, des centaines de Musiciens parcourent les Terres Hautes, indifférents aux limites des domaines et des fiefs, pour récolter des histoires.
Bertram le Baladin, célèbre Musicien de la Guilde, a perdu son luth – ou plutôt, on le lui a dérobé. Bien décidé à le retrouver, il est contraint de s’associer avec une femme, Sans-Nom, témoin du larcin.
C’est ainsi que l’étrange duo part en quête du luth, dans un monde où la magie réside dans toutes les histoires : ragots, chansons ou légendes.
Une petite musique de fantasy
Alors oui c’est vrai, on a difficilement fait plus simple comme pitch de départ : Bertram, un baladin membre de la puissante Guilde des Musiciens s’est fait voler son luth et va tout faire pour le retrouver. Voilà, ça se pose là. Coup de chance, en suivant les traces de ses voleurs, il arrive dans une auberge dans laquelle il rencontre une femme qui a vu ce qui s’est passé. La suite… est dans le livre !
C’est sûr, ce n’est pas très épique. Pas de grandes armées, de combats féroces, d’intrigues de cour, de trône de fer, etc… Mais pour autant, un intrigue « à hauteur d’homme » ne manque pas forcément d’attraits et c’est ce que Camille Leboulanger nous montre avec ce roman, sans temps mort, bien écrit et qui ne manque pas à plusieurs reprises de surprendre le lecteur (la bombe qu’il pose à mi-récit est à ce propos tout à fait efficace !).
Plus ou moins divisé en trois actes (pour autant de lieux différents, l’univers du roman reste donc relativement peu décrit mais là encore cela va de pair avec cette intrigue resserrée qui n’est pas là pour faire faire le tour du monde aux personnages), « Bertram le baladin » est une sorte de zoom sur quelques personnages pris de près ou de loin dans la quête personnelle du baladin. Ce dernier est incontestablement le personnage phare du roman (on n’en attendait pas moins vu le titre !) et son désir ardent de retrouver son luth coûte que coûte va le mener plus loin qu’il ne l’imaginait. Y compris là où il ne souhaite pas aller… Il sera donc accompagné de Sans-Nom, cette femme qui lui permet de ne pas perdre la trace des voleurs. Une femme également plus complexe qu’on ne le pense, mais son personnage souffre un peu de l’omniprésence de Bertram. Les autres protagonistes, comme Chicots (un petit escroc sans scrupule), le seigneur de la ville de Strid ou bien sa fille, restent dépeints assez rapidement.
Peu de personnages donc, un univers restreint et pourtant quelques belles trouvailles, comme le fait que le secret de la fabrication du papier ait disparu, ce qui donne un rôle majeur à ces Musiciens, chargés non seulement d’amuser les foules mais aussi de colporter les nouvelles dans le monde entier, d’où l’énorme puissance de la Guilde, puissance qui pose d’ailleurs question. Autre conséquence : la mémoire. Ou plutôt les mémoires puisque les riches et les puissants, pour garder une trace de leurs actes, leurs paroles, engagent des « mémoires », des hommes chargés de mémoriser tout, absolument tout, et capables de ressortir n’importe quel élément à la demande. Un élément fascinant, malheureusement trop peu utilisé à mon goût… Les mémoires et les Musiciens m’ont d’ailleurs fait penser aux Hommes-Livres du « Fahrenheit 451 » de Ray Bradbury. Ce n’est peut-être pas un hasard, mais là j’extrapole beaucoup, puisque qu’un autre élément m’a fait penser qu’au lieu de fantasy nous pourrions avoir affaire à de la SF… Mais ça reste un détail. À noter également, le passé de la ville de Strid, vite abordé mais qui donne un peu de consistance à cet univers plus esquissé que réellement décrit.
Et donc, au final, Camille Leboulanger nous offre un récit vif et bien mené, haletant même par moment, même si on peut regretter à deux reprises un recours à ce qui pourrait s’assimiler à un « deus ex machina », ou disons à une coïncidence bien heureuse… Dommage mais pour le reste, j’avoue avoir passé un joli moment de fantasy, simple, enlevé, avec son lot de surprises. Mettant en avant des thèmes tels que la rédemption, l’amitié, la musique, l’échange, la communication, « Bertram le baladin » est un bon moment de lecture, assurément.
Lire aussi les avis de Cédric, Blackwolf, Le prof de l’être.
Mouais… ça m’évoque à la fois Le nom du vent (pour l’importance du Luth et des artistes) et les Mentats de Dune pour les Mémoires. Pas follement original, donc (sans compter que la perte du secret de la fabrication du papier, j’adhère très moyennement à l’idée, elle me paraît grotesque, vu le nombre de solutions de repli qu’il y a, du papyrus aux tablettes d’argile). Bref, certainement pas de quoi m’inciter à lire ce bouquin. Mais merci pour ta critique.
Il est difficile d’être 100% original sans qu’aucune référence ne fasse surface…
Pour la fabrication du papier, c’est une manière de donner de l’importance à l’oralité (et donc aux « mémoires » et aux baladins) mais la cohérence du truc est un peu passée sous silence. Ceci dit, des tablettes ne peuvent guère remplacer la papier, leur « fabrication » prenant du temps. Pour la papyrus, je te rejoins, même si sur le long terme, sa conservation pose problème (mais on pourrait imaginer des scribes chargés de recopier les documents anciens sur des supports neufs).
De toute manière, je n’ai pas le sentiment que ce roman soit vraiment fait pour toi. 😉
Je me souviens d’avoir lu avec plaisir son premier roman, sorti à L’Atalante… A voir pour celui-là 🙂
Pas lu, mais j’en avais entendu parler, il avait eu plutôt bonne presse il me semble.
Ils font des vêtements en tissu mais ne savent pas faire un support pour l’écriture ? Sérieux ?
Bah oui. Encore une fois, le contexte du roman n’est des plus importants. Mais en effet, c’est un souci pour la cohérence du truc.
J’avais trouvé ça sympathique aussi, nos avis ont l’air de se rejoindre 🙂 Pour ma part j’ai été déçue par le personnage de Sans Nom alors que j’ai bien accroché à celui de Bertram (c’est vrai que, comme tu dis, le rebondissement au milieu du roman est très bien amené et relance l’intérêt)
Sans-Nom perd un peu de son intérêt une fois qu’on connaît son histoire.
Et côté rebondissement, celui du milieu vaut son pesant de cacahouètes, alors que d’autres (mais de moindres importances) semblent céder à la facilité.
Reste un sympathique roman centré sur une intrigue simple, mais pas un chef d’oeuvre.
Quand j’ai vu la page de couverture, j’ai franchement hésité à lire ton article. Pour moi ce genre de couvertures évoque la fantasy tournée purement sur l’aventure, qui ne m’intéresse pas tellement. Mais quel pitch ! Ca fait carrément envie. J’espère juste que cette idée de monde sans papier, obligé de revenir à une mémoire orale, est exploité à la hauteur de ce qu’elle représente. Tu dis que l’auteur aurait pu aller plus loin sur ces hommes qui doivent conserver la mémoire des choses. Ok. Mais estimes-tu l’idée d’ensemble bien exploitée ? A titre d’exemple, si je m’engage dans une telle lecture, j’attends a minima que la question de la mémoire historique soit interrogée.
Tout cela fait bien envie en tout cas !!!
N’y allons pas par quatre chemins : c’est de la fantasy axée aventure !
Ce que j’explique sur les hommes-mémoires représente bien le contexte du truc, mais très honnêtement ce n’est qu’un élément du roman, qui n’est là que pour « décorer » malgré l’importance de la chose. Donc plutôt que bien exploité, je poserais la question du « suffisamment exploité » et là : non, on aurait sans doute pu en faire tellement plus sur le sujet.
Mais ce n’est pas le propos de l’auteur qui a souhaité faire un roman d’aventures centré sur quelques personnages (deux essentiellement d’ailleurs, comme souvent dans des romans d’aventures, côté fantasy on peut penser au « Cycle des épées » de Fritz Leiber qui met en scène les aventures de Fafhrd et le Souricier Gris, sans le côté magie absent du roman de Camille Leboulanger), réussi ce point-là.
Ok c’est dommage alors. Mais je l’ai noté quand même. Je lis de temps à autre de la fantasy. Donc autant que ce soit sur des idées qui me stimulent, comme celles-ci. A+
Intéressant, à l’occasion peut-être…
Ça se lit rapidement. 😉
Merci pour ce retour, sans ça je ne m’y serais pas forcément attardé.
Je le note dans un coin, sait-on jamais.
Entre deux trucs un peu plus « touffus », c’est parfait. 😉
Je t’ai déjà parlé de mon avis sur la couverture ? =X
J’ai donc un a priori négatif, compensé d’un a priori positif vis-à-vis de l’histoire et de ta chronique, alimenté d’un nouvel a priori négatif en lisant les commentaires. Fiou, heureusement que je ne pense pas le croiser tout de suite, sinon je serais perdu avant même de l’entamer. =P
Mmmmh, oui il me semble bien avoir vu ça quelque part… 😀
Tous ces a priori un coup positifs un coup négatifs font que tu vas devoir te faire un avis par toi-même ! 😀
[…] Cédric, Lorhkan, […]
[…] avec une seule envie de lecture, celle de Bertram le baladin de Camille Leboulanger (les avis de Lorhkan et Cédric) et j’hésite toujours sur La bibliothèque de Mount Char de Scott Hawkins […]
[…] avis:Blackwolf, Boudicca, Lorhkan, Reflets de mes lectures, Fantasy à la […]
[…] avis: Lhotseshar, Blackwolf, Boudicca, Lorhkan, Reflets de mes lectures, Fantasy à la […]