Djinn, la maudite, de Jean-Louis Fetjaine
Quatrième de couverture :
1130, Princée d’Antioche – au nord de l’actuelle Syrie.
Fille du roi Baudouin de Jérusalem, la princesse Alix d’Antioche s’apprête à accoucher en secret de son enfant illégitime, fruit de ses amours avec le connétable Renaud Mazoir. Personne ne doit apprendre cette naissance : sa mère a décidé que l’enfant ne survivrait pas.
Mais son père, prévenu par ses informateurs, arrive à temps pour le sauver. L’accoucheuse, elle, est sacrifiée, non sans avoir jeté sur Alix une malédiction : l’esprit malin d’un Djinn s’attache désormais à ses pas.
Mis à l’abri des velléités meurtrières de sa mère, le nouveau-né grandira au sein de la mystérieuse secte des Assassins ; son destin sera lié à celle-ci. Et la princesse maudite, poussée par son ambition dévorante, se voit emportée dans les tourments d’une terre dont l’histoire s’écrit trop souvent dans le sang…
De Byzance à Jérusalem, d’Alep à Damas, une grande fresque où se côtoient l’histoire et le fantastique, dans le fracas des batailles incessantes entre Turcs, Byzantins et Croisés.
Anges et démons aux temps des Croisades
Aaaah, les Croisades ! Période fascinante de l’Histoire (pourtant sans doute trop méconnue), période ou tout semble possible, en bien comme en mal, période de guerres bien sûr, mais aussi d’alliances parfois surprenantes. Et enfin, une période qu’il serait de bon ton de regarder plus attentivement tant elle fait écho sur bien des points à notre époque actuelle…
C’est en ces temps chaotiques qu’a choisi Jean-Louis Fetjaine de situer de situer son roman, « Djinn, la maudite ». Et plus précisément entre la première et la deuxième Croisade. Le récit débute en 1130, alors que la princesse Alix d’Antioche est sur le point d’accoucher d’un garçon, fruit d’une aventure illégitime avec le connétable Renaud Mazoir. C’est lors de cet accouchement que la princesse va se voir posséder par un djinn (sorte de démon oriental), et tous ses actes ultérieurs découleront de cette possession.
Et c’est peu dire que la vie de la princesse Alix a été mouvementée, comme le montre le roman (qui se déroule sur plusieurs années). Mais pas seulement le roman puisque Jean-Louis Fetjaine s’est énormément documenté et tous les événements ou presque (le point de départ du roman est pure invention il me semble) du récit sont des faits historiques, avec certes parfois quelques raccourcis (comme en ce qui concerne Hugues du Puiset), mais l’essentiel est bien là. On nage donc en pleine fantasy historique, dans laquelle les événements que nous connaissons semblent plutôt être le fait, en sous-main, d’une manipulation des « forces supérieures » (qui n’apparaissent pourtant jamais directement. À moins que…). Il en résulte des guerres, souvent absurdes, des conflits mouvants, des alliances qui se font et se défont au gré des incidents et autres péripéties de l’Histoire, avec au-delà même des classiques oppositions religieuses (chrétiens contre musulmans) des oppositions internes dans un même camp (chrétiens contre chrétiens, musulmans contre musulmans), démonstration de l’absurdité de ces guerres. La situation géopolitique de l’époque est complexe, il y a de nombreuses factions (empire byzantin, secte des assassins, turcs, différents califats, sultanats et émirats…) dont l’obédience n’est jamais assurée. Bien évidemment, tout cela rappelle bien tristement, et ce n’est bien sûr pas un hasard, toute la complexité de la situation que nous connaissons actuellement puisque les lieux sont les mêmes : Syrie, Irak, Israël…
J’ai dévoré ce roman en deux jours. Certes il n’est pas très épais (moins de 300 pages), mais il est passionnant pour qui s’intéresse à l’Histoire. On peut bien sûr s’interroger sur la pertinence de faire intervenir la fantasy dans un roman si orienté sur le côté historique. Je pense pourtant qu’on se retrouve là dans le même cas qu’un Guy Gavriel Kay qui affirme que la fantasy permet de jouer avec l’Histoire, sans volonté d’être 100% réaliste historiquement. C’est ce que reproduit Jean-Louis Fetjaine ici puisque le point de départ du roman (l’enfant illégitime d’Alix et de Renaud Mazoir) est inventé (à ce que je sache…). Dès lors, la fantasy est un moyen d’apporter une touche plus romanesque, plus exotique aussi avec ces esprits orientaux, et une sorte de « justification » à ces conflits qui n’ont parfois ni queue ni tête et n’ont mené à rien de concret.
Côté narration, l’auteur sait y faire, le récit est rythmé, certains personnages sont attachants (notamment Renaud Mazoir et l’assassin Saïf Ibn Ammar), d’autres plus révoltants (Alix bien sûr, à la fois terrible et fascinante), mais tous sont vivants. On pourrait peut-être reprocher au roman de ne pas avoir de vrai personnage principal, la trame s’en trouve donc parfois un peu relâchée, mais c’est un menu détail face au plaisir que j’ai pris à sa lecture.
Un excellent roman donc, facile d’accès malgré une période historique complexe, période qui d’ailleurs pourrait encore offrir pas mal de possibilités à l’auteur. Si Jean-Louis Fetjaine se décide à poursuivre sur terrain-là, je le suivrais sans hésitation !
Lire aussi l’avis de Xapur.
J’avais déjà repéré ce roman (Fantasy historique, contexte exotique, etc), et la lecture de vos critiques, à Xapur et à toi, me fait dire qu’il est très probable que je l’apprécie beaucoup. En plus il est court, ça tombe bien, il devrait pouvoir s’insérer un jour ou l’autre dans un trou de mon programme de lecture. Merci pour ta critique !
Oui c’est court, ça va vite, à l’essentiel, et pour qui aime l’Histoire, c’est un moment très agréable. Pas un grand chef d’oeuvre, mais une très bonne lecture.
Et ça nous montre que les faits historiques sont parfois assez fous pour qu’on y insère de la fantasy sans les dénaturer ! 😀
Il y a pas mal de critiques communes en ce moment, c’est tant mieux, cela me conforte dans mes futurs choix de lecture. J’aime beaucoup l’auteur, et je pense que ce roman (court) est fait pour moi.
Merci de cette super critique qui donne bien envie. Enfin, un univers qui change!
J’ai découvert l’auteur avec ce roman. Je le connaissais de nom mais je n’avais rien lu de lui (ses célèbres romans sur les elfes sont parus avant que je ne me remette à lire de la fantasy, et depuis je n’ai pas fait de rattrapage…).
Oui ça change un peu, le temps des Croisades n’est pas très exploré (de même pour le côté oriental de la fantasy, même si ça reste assez léger ici). Si tu aimes l’époque, j’avais beaucoup aimé « Tancrède, une uchronie » de Ugo Bellagamba : https://www.lorhkan.com/2011/08/11/tancrede-de-ugo-bellagamba/
Je le note celui-ci, j’avais apprécié sa trilogie sur les Elfes aussi dans mon souvenir (lointain) !
Alors si tu aimes déjà l’auteur, il n’y pas de raison pour que ça ne continue pas !
Ma prochaine lecture justement ^^ Ça fait plaisir de voir que je ne devrais pas être déçue, merci pour ta critique 🙂
En espérant que tes attentes soient comblées. 😉
De rien ! 🙂
Il y a aussi Royaume de vents et de colère qui use de fantasy dans un récit historique et c’était très chouette aussi. Bref, mélanger fantasy et histoire oui, ça ajoute de la diversité aux genres littéraires.
Exact, où encore la trilogie « Rois du monde » de Jaworski, ou encore la trilogie « Troie » de David Gemmell (quoique là on est plus dans le légendaire…), ou encore la trilogie des « Lames du cardinal » de Pierre Pevel… Il y a plein d’exemples, et c’est un genre de fantasy que j’aime beaucoup.
Tu donnes envie! 🙂
C’est fait pour ! 😀
Ahhhh un livre court et bien ! C’est top ça, deux avis positifs, je suis tout conquis.
C’est une période qui m’attire, surtout le côté oriental, arabo-mystique (j’ai le droit d’inventer ce mot ? :D).
Oui oui, tu as le droit ! 😀
Des livres courts, ce n’est pas si courant en fantasy, encore un élément « dépaysant » à mettre au crédit du roman ! 😉
Ca me fait penser un peu au Roi d’Août de Michel Pagel qui revisitait le règne de Philippe Auguste avec une touche de fantasy. J’avais bien aimé sa trilogie des elfes, du coup je m’intéresserais peut-être un jour à ce roman.
La fantasy historique, en général ça me plaît bien (quoique ça dépend quand même des époques revisitées). Là, ça a très bien fonctionné pour moi.
Si tu aimes déjà l’auteur, fais toi plaisir. 😉
Et je note l’oeuvre de Michel Pagel dans un coin. 😉
Le Roi d’Août, ce n’est pas du tout la même épaisseur ni la même ambition, mais c’est en effet à lire ^^
Sinon, mon avis rejoins le tien sur le Fetjaine, un bon moment de passé 🙂
Plus épais et plus ambitieux pour le Roi d’Août ? 700 pages en poche, ça semble être un bon bébé ! Ce n’est pas cette partie de l’Histoire qui m’intéresse le plus, mais si vous êtes plusieurs à insister… 😉
Oui, plus ambitieux dans ce sens ^^
Je suis passée à côté pour ma part 🙁
Oh c’est dommage ça, ça se lit pourtant presque tout seul !
Pas lu au bon moment peut-être ?
En effet ça se lit tout seul, mais je ne suis pas rentrée dedans.
Bonjour,
Tout d’abord, merci beaucoup pour votre article. Ça fait plaisir de voir qu’après un certain temps d’inactivité, Jean-Louis Fetjaine retrouve un public.
J’ai bien pris en compte vos remarques et les transmettrais à l’auteur.
Si cela vous intéresse, une page Facebook a été créée afin d’être au courant des dernières actualités de l’auteur : https://m.facebook.com/FetjaineDjinn/
Encore merci,
Eloïse Fetjaine
Son nom n’a pas été oublié par les lecteurs. 😉
Merci pour la page Facebook, ça va me permettre de ne pas rater l’info sur un deuxième tome. 😉
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[…] Je crois que Djinn la maudite pâtit avant tout d’un manque d’ambition quant aux personnages. Ils ne fonctionnent que sur des archétypes, en raison d’un faible nombre de pages, alors qu’ils ne manquent à la base pas d’intérêt. Une déception donc, puisque le Moyen Age est ma période de prédilection, que je vous invite à modérer en lisant par exemple la chronique bien plus positive (quasi enthousiaste !) de Lorhkan. […]