Livre de sang, de Clive Barker
Quatrième de couverture :
Simon McNeal, faux médium mais vrai escroc, prétend être en contact avec l’au-delà. Il se trouve justement que, depuis leurs ténèbres, les morts cherchent à raconter leurs histoires aux vivants ; ils vont faire du corps du jeune homme leur livre de sang, réceptacle de leurs expériences, leurs frustrations, leurs souffrances, leurs perversions. Soyez donc témoins des paroles des défunts : fuyez le métro de New York, théâtre de crimes atroces ; découvrez combien la hantise est difficile pour un démon malhabile ; prenez part à l’étrange et effrayant rituel auquel sacrifient tous les dix ans deux cités… Lisez le dit des morts, et craignez leur courroux !
De l’horreur, mais pas que…
Six nouvelles sont au sommaire de ce recueil qui, plutôt que d’être le simple assemblage de textes plus ou moins liés par une thématique, se veut en fait être un vrai concept.
Ainsi, la nouvelle qui donne son titre au recueil, « Livre de sang » donc pour ceux qui ne suivent pas, établit ce fameux concept. Simon McNeal, un faux médium qui se moque des scientifiques mais aussi des morts, joue un jeu dangereux. A tel point qu’il pourrait bien y laisser la peau, ou plutôt en faire un parchemin sur lequel les morts raconteront leur histoire, ces histoires constituant les cinq nouvelles suivantes (et celles des autres recueils). Une entrée en matière surprenante, sans doute un peu trop longue pour ce qu’elle a à dire mais l’atmosphère est réussie.
La suivante, « Le train de l’abattoir », nous plonge en pleine horreur dans le métro new-yorkais. Un métro qui mène… bien plus loin que le terminus ! Horreur pure, gore, mais aussi une forte influence lovecraftienne font de ce récit mêlant deux point de vue opposés et une révélation finale surprenante faite de créatures ancestrales une vraie réussite du genre, si on arrive à supporter certaines descriptions très sanglantes !
« Jack et le cacophone » est radicalement différent. Un démon de seconde zone est missionné par les puissances infernales : tourmenter Jack Polo, importateur de cornichons de son état. Mais ce dernier semble totalement imperturbable, et le démon, ce fameux cacophone, risque bien d’y perdre son latin, malgré son imagination débordante ! Un récit surprenant car le ton change radicalement. Ici, l’horreur pure cède le pas à l’humour et le second degré. Et sur ce terrain un peu délicat sur lequel je n’attendais pas Clive Barker, force est de constater que l’auteur s’en sort remarquablement bien. Une vraie bonne surprise !
En revanche, je suis plus réservé sur la nouvelle « La truie ». L’horreur revient sur le devant de la scène, de manière moins frontale que dans « Le train de l’abattoir » mais plus psychologique, malsaine et glauque avec cet institut pour mineurs délinquants dans lequel de sombres secrets seront dévoilés. Un style et une ambiance que n’aurait sans doute pas reniés Stephen King. Sauf que j’avoue que cette accumulation de trucs un peu énormes (et un peu ridicules aussi quand on y pense) ne m’a pas emballé plus que ça. On sent pourtant que le potentiel est là, mais ça n’a pas fonctionné sur moi.
Mais Clive Barker a plus d’un tour dans son sac et son récit fantastico-horrifique « Les feux de la rampe » remonte largement le niveau. Théâtre et morts-vivants sont au programme. J’avoue que bien souvent les récits nous plongeant dans les coulisses d’un théâtre ont tendance à m’intéresser, et là avec cette histoire d’amour macabre un brin désaxée, j’ai vite été emballé. Un théâtre semble vivre ses dernières heures mais c’est sans compter sur quelques morts-vivants bien décidés à proposer du divertissement à leurs semblables. C’est macabre, c’est décalé, c’est amusant, et c’est réussi.
Enfin, le recueil se clôt avec « Dans les collines, les cités », texte qui a obtenu le British Fantasy Award en 1985. Pas vraiment d’horreur cette fois, mais du fantastique pur avec ces créatures géantes dont je ne peux dévoiler la constitution sans spoiler outre mesure. Une chose est sûre : ce récit fait naître de grandioses images dans l’esprit du lecteur. Marquant à nouveau, avec un petit quelque chose de mythologique qui m’a rappelé, dans un genre totalement différent, « Les pantins cosmiques » de Philip K. Dick.
Étonnant recueil donc, que j’attendais plus marqué par l’horreur pure mais qui finalement a le grand avantage d’offrir des plaisirs variés et montre que Clive Barker a plus d’une corde à son arc. De l’horreur donc, mais pas seulement, humour, fantastique, érotisme (voire un peu plus pour ce dernier thème) parsèment aussi le recueil. Une belle entrée en matière donc, sans doute à ne pas mettre entre toutes les mains tout de même (âmes sensibles s’abstenir), et je ne manquerai pas de continuer à explorer les univers de l’auteur qui semble avoir de bien belles choses à offrir, en nouvelles comme en romans.
Lire aussi les avis de Nebal, Chaperon Rouge, les pages qui tournent, Sophie Schweitzer.
Ah tiens c’est marrant, moi aussi je commence Barker d’ici quelques semaines (par Secret Show, pour ma part). Du coup, si j’accroche à ce premier roman, je sais quoi lire ensuite ^^
Merci pour ta critique !
Les grands esprits se rencontrent on dirait ! 😉
Je lirai ton article sur « Secret show » avec intérêt, je l’ai acheté lors d’une OP Bragelonne.
Cela fait un petit moment que j’ai repéré les Clive Baker.
C’est pas super, mais la seule chose qui m’a retenue de vraiment chercher davantage, ce sont les couvertures vues ça et là. Elles affichaient la tendance horreur que je pressentais et que tu confirmes.
Du coup, j’allais pas me lancer « awalpé » sur un roman et attendais sagement que les blogopotes fassent des retours – si peu.
Déjà un grand merci Lorhkan! L’horreur n’est pas mon truc, j’en ai horreur. Non plus sérieusement, déjà le fantastique n’est pas mon genre de prédilection de ‘imaginaire, associé à un côté horrifique, je décline.
Mais, je lirai toutes tes chroniques au cas où il y aurait un roman qui contient le petit truc en plus.
Barker est un auteur d’horreur avant tout il me semble, horreur souvent mêlée à du fantastique. Donc déjà, pour toi, ça commence mal… 😀
Ceci dit, si l’horreur reste présente, certains de ses romans (et aussi certaines nouvelles donc) vont au-delà de ce seul genre, je pense à « Imajica », « Le royaume des devins », « Galilée », « Sacrements » et sans doute d’autres, mais ne les ayant pas encore lus, je ne peux le dire avec certitude (je laisse les spécialistes confirmer ou infirmer).
J’ai surtout l’impression que ses romans sont extrêmement riches et denses, c’est surtout ça qui m’intéresse en fait, pas simplement l’horreur pure.
J’adore découvrir un auteur par des nouvelles. Même si l’horreur n’est pas ce que je préfère, je note ce livre dans mes envies.
Merci pour le retour.
J’ai toujours trouvé que le meilleur moyen de découvrir un auteur c’était de passer par des nouvelles, même si un bon nouvelliste ne fait pas toujours un bon romancier (et vice versa).
L’horreur (et le fantastique) n’ont pas vraiment la côte en France depuis pas mal d’années maintenant. Moi-même je ne me tourne pas d’instinct vers ces genres. Mais les rééditions de Clive Barker chez Bragelonne m’ont tapé dans l’oeil (avec les belles couvertures de Bastien Lecouffe-Deharme).
Je prends note. Il faudrait que je le lise.
Si le genre t’intéresse oui, ces recueils (et l’oeuvre de Barker en général) ont plutôt bonne presse.
Je pense que je vais faire mon âme sensible, déjà que certains passages du Royaume des devins m’avaient traumatisée… Ceci dit j’avais beaucoup aimé son cycle jeunesse, Abarat (mais je suis pas sûre que les derniers tomes soient publiés un jour en français hélas)
« Le royaume des devins » est sur ma PAL depuis peu, je ne connais pas son niveau d’horreur par rapport à ce « Livre de sang »… Ceci dit, en dehors de la nouvelle « Le train de l’abattoir », vraiment gore, le reste reste accessible (si on supporte le glauque), mais ça reste toujours délicat de conseiller ce genre de lecture quand on ne connaît pas le « degré d’acceptation » du lecteur.
« Abarat » n’est pas terminé en effet, pas sûr qu’il le soit en jour (en français s’entend)…
Trop gore pour le petit joueur que je suis ^^
Allez, retourne jouer dans le bac à sable ! 😆
La page de couverture est bien effrayante en tout cas ^^. Ton article me donne envie d’essayer. Je pensais ne pas spécialement aimé l’horreur, mais après avoir lu Le Chant de Kali il y a une semaine, de Dan Simmons, j’ai envie de creuser un peu plus ce genre. Je note donc !
Je n’ai pas lu ce texte de Simmons, donc je ne peux pas les comparer. Encore une fois, c’est difficile de conseiller ce genre de lecture sans connaître le lecteur… J’ai envie de dire que si on supporte « Le train de l’abattoir », on doit pouvoir supporter pas mal de choses ! 😀
Je n’ai pas lu « Le train de l’abattoir ». Mais vu son nom, il promet ^^
Et ben, je retiens que ce petit recueil serait pas mal du tout pour découvrir l’auteur, l’horreur, ça ne me dérange pas ^^
Même pas peur ! 😀
Tente le coup, tu me diras ce que tu en auras pensé. 😉