Dragon, de Thomas Day
Quatrième de couverture :
Bangkok. Demain.
Le régime politique vient de changer.
Le dérèglement climatique global a enfanté une mousson qui n’en finit plus.
Dans la mégapole thaïlandaise pour partie inondée, un assassin implacable s’attaque à la facette la plus sordide du tourisme sexuel. Pour le lieutenant Tannhäuser Ruedpokanon, chargé de mettre fin aux agissements de ce qui semble bien être un tueur en série, la chasse à l’homme peut commencer. Mais celui que la presse appelle Dragon, en référence à la carte de visite qu’il laisse sur chacune de ses victimes, est-il seulement un homme ?
Un massage coup de poing thaïlandais
Ce n’est pas la Thaïlande de carte postale que nous propose Thomas Day. Tout simplement car ce texte est signé Thomas Day. Et donc on se doute bien que le voyage ne va pas être de tout repos. Et c’est bien le cas, dans ce futur proche où le pays subit d’énormes inondations dues au dérèglement climatique et où le tourisme sexuel reste malheureusement florissant.
C’est dans ce contexte moite et sordide qu’un policier, Thann, a pour mission de mettre fin aux agissement de ce qui ressemble à un tueur en série, lui qui marque ses victimes avec une carte de visite portant l’image d’un dragon, d’où son surnom : Dragon. Mais ses victimes ne sont pas n’importe quelle victimes : il s’agit de pédophiles coupables d’actes sexuels sur mineurs, dans des lieux de prostitution « provisoires » (qui se déplacent régulièrement, pour échapper aux forces de l’ordre, mais ces dernières font-elles vraiment tout ce qu’il faut ?). Mais un criminel reste un criminel, n’est-ce pas ?
Voilà donc la noirceur humaine à nouveau mise en face du lecteur, comme l’auteur en a l’habitude. La prostitution infantile existe, et l’auteur n’édulcore pas son propos. Certaines scènes sont violentes et crues, à l’image de la couverture du livre : Dragon tranche dans le vif. Ce faisant, avec Thann qui tente de l’arrêter et surtout avec le discours de Susan Schwartz, présidente d’une ONG qui lutte contre la prostitution infantile, se pose la question des actes du tueur. C’est un tueur certes, mais un tueur de pédophiles, est-ce vraiment un mal ? Sans être pour la peine de mort, laisser un criminel faire un peu le ménage, où est le problème ?
Ainsi, avec ce texte incisif à la plume vive et acérée (et aux chapitres mélangés sans que cela nuise à la compréhension du texte, c’est très réussi de ce point de vue même si on peut se demander s’il y a une réelle plus-value par rapport à un déroulement linéaire, à tester…) et dont la brièveté joue pour lui (même si on sent venir la fin un peu trop à l’avance), lui donnant l’effet d’un bon coup de poing dans la gueule là où un roman aurait peut-être perdu de sa force, Thomas Day nous met face au côté sombre de la nature humaine : les actes ignobles de certains, que d’autres couvrent car cet immonde trafic amène de l’argent. Corruption, esclavage, tout y passe. Et pourtant, l’auteur ne manque pas de signaler que certaines traditions culturelles peuvent aussi expliquer cet état de fait.
La Thaïlande, que l’on sait cher au coeur de l’écrivain (on sent que ce texte a peut-être été vécu par lui comme une catharsis), n’apparaît pas forcément ici sous son meilleur jour, même si, entre tous ces côtés sombres, apparaissent aussi quelques rayons de soleil. Pays complexe certainement, la Thaïlande n’en a pas fini de lutter avec ses démons. Et Dragon en est un, aux multiples visages…
Lire aussi les avis de Cornwall, Efelle, Boudicca, Blackwolf, Nebal, Oukouloumougnou, l’Ours inculte, Karine, Yozone, Nicolas Winter, Cyrille, Yossarian, Soleil vert, Tasha, l’Etrange épicerie, Amaranth, Yueyin…
A lire, à lire.
J’aime bien l’auteur et ta critique est convaincante!
Je ne vais pas être original mais à lire oui, comme le reste de la collection en somme. 😉
Il faut que je l’achète celui-ci, son thème m’intrigue beaucoup!
C’est assez dur mais c’est bien d’en parler aussi en SF (même si l’aspect qui relie ce texte aux littératures de genre le place plutôt dans le fantastique et n’est pas l’élément le plus important du récit).
Ouiii, mais il est vraiment très bon ce livre !
Quelque part je suis contente de l’avoir lu avant le Ken Liu car peut-être que j’aurais été déçue (parce que Ken Liu met le niveau très haut !)
Mais maintenant je sais à quoi m’attendre et j’ai hâte de lire les autres Heures Lumières 🙂
C’est difficile de comparer les deux textes qui, même s’ils décrivent des actes atroces, ne se placent pas du tout sur le même plan côté émotionnel. Je donne tout de même une préférence au texte de Ken Liu plus riche thematiquement, mais le texte de Thomas Day a toute sa place dans la collection.
C’est sûr qu’il ne nous dorlote pas le sieur Day. 😉
C’est le moins que l’on puisse dire, et si ça avait été le cas on aurait sans doute été déçus… 😉
Quand je vois la liste de chroniques, j’ai l’impression d’être la seule à pas avoir encore lu ce bouquin. Heureusement certains autres commentaires me rassurent 😀
J’aime bien répertorier plein de chroniques, et comme ce texte était le premier d’une collection fort attendue, il y en a un paquet !
Ceci dit, tu peux toujours rattraper ton « retard ». 😉
Je suis pas sûre d’avoir le coeur assez accroché pour celui-là, mais je suis pas sûre de résister à l’envie d’acheter toute la collection donc je le lirais peut-être quand même ^^.
Faut avouer que ça remue, en fonction des sensibilités ça peut ne pas passer…
Après, le côté collectionnite, ça ne se contrôle pas ! 😛
Un texte dur mais très bon. J’ai beaucoup aimé la construction non linéaire des chapitres, ça joue beaucoup sur le suspens du texte je trouve.
Je ne sais toujours pas si cette déconstruction donne un réel plus au roman, on pourrait peut-être trouver une certaine unité thématique à chaque partie… En tout cas, il se lit très bien, signe que ça ne nuit en rien au texte.
Et oui, c’est dur mais bon.
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