Vostok, de Laurent Kloetzer
Quatrième de couverture :
Vostok, Antarctique. L’endroit le plus inhospitalier sur Terre. Des températures qui plongent jusqu’à – 90 °C. En 1957, les Russes y ont installé une base permanente, posée sur un glacier de 3 500 mètres d’épaisseur, ignorant alors qu’à cet endroit, sous la glace, se cache un lac immense, scellé depuis l’ère tertiaire. Pendant des décennies, équipe après équipe, puits après puits, ils ont foré la glace. Pour trouver, peut-être, des formes de vie jusque-là inconnues.
Vingt ans après la fermeture de la base, un groupe d’hommes et de femmes y atterrit, en toute illégalité. Ils vont réchauffer le corps gelé de Vostok, réveiller ses fantômes. Ils sont là pour s’emparer du secret du lac. S’ils échouent, il ne leur sera pas permis de rentrer vivants chez eux.
Situé dans le même futur qu’Anamnèse de Lady Star, « Vostok » narre l’incroyable aventure d’une très jeune femme, Leonora, condamnée à laisser les derniers vestiges de son enfance dans le grand désert blanc.
Le grand bleu blanc
Certaines aventures humaines n’ont pas besoin d’un surplus de SF ou de fantastique pour être extraordinaires. C’est le cas de l’histoire de la base russe Vostok, installée depuis 1957 en Antarctique pour étudier le climat, et située fortuitement sur un immense lac souterrain (appelé fort logiquement lac Vostok) découvert en 1989 et situé près de 4000 mètres sous la glace. Il faut dire que la base Vostok est particulièrement isolée (à plus de 1000 kilomètres de la côte) et son emplacement est l’un des plus froids du globe (record en cours : -89.2°C ! Température moyenne en hiver : -65°C et en été : -30°C). Pas vraiment le genre d’endroit où on peut prendre son petit-déj’ en caleçon au soleil. C’est donc une formidable aventure scientifique, portée par les Russes alors en plein guerre froide, dans ce qui ressemblait fort à la course à la Lune, version Antarctique. Une aventure racontée par le scientifique français Jean-Robert Petit dans son livre « Vostok, le dernier secret de l’Antarctique » (les scientifiques français, puis plus tard américains ont collaborés avec les Russes), dont parle très bien Charybde2. Et c’est d’ailleurs à Jean-Robert Petit que Laurent Kloetzer doit, je cite, « cette rêverie inspirée de son travail », le chercheur ayant également relu le roman pour lui donner une belle justesse scientifique (la couverture, signée Aurélien Police, s’inspire elle aussi de la véritable station en reprenant le bâtiment du forage n°5).
Mais de quoi donc cause « Vostok » ? On s’en doute, d’une expédition en Antarctique. Mais pas par n’importe qui, puisqu’il s’agit d’une équipe montée par un membre d’un cartel chilien (une expédition illégale donc) qui va tenter d’aller trouver à Vostok la clé lui permettant d’infiltrer le réseau de ses concurrents. « Vostok » est un thriller d’anticipation, situé dans un futur proche qui partage bien plus que quelques points communs avec le roman précédent des Kloetzer, « L’anamnèse de Lady Star », jusqu’à ce que les histoires se croisent complètement.
Mais avant d’aller se les geler en Antarctique, l’auteur nous expose la situation à Valparaison, au Chili. Présentation des enjeux, des personnages (notamment Leonora, cette jeune adolescente forte et indépendante, qui rêve de s’émanciper en quittant le Chili, et son frère Juan, caïd de Valparaiso, personnage trouble dont l’instabilité psychologique irriguera une bonne partie du roman), une grosse introduction de presque une centaine de pages (sur les 400 que compte le roman, ça peut sembler beaucoup mais elle est très efficace et jamais ennuyeuse).
Puis enfin, place à l’Antarctique. Et nous voici donc plongés dans ce huis-clos des grands froids, avec ces personnages obligés, sous peine de ne pas faire de vieux os s’ils rentrent bredouille, de trouver ce qu’ils sont venus chercher. Mais rien n’est facile dans ce lieu glacé où la vie n’est que survie, où l’homme n’est pas le bienvenu. Tout devient compliqué : avoir de l’eau est compliqué, se chauffer est compliqué, sortir est compliqué, travailler est compliqué. Alors faire revivre une station russe abandonnée depuis plusieurs années au coeur de cet enfer blanc relève de l’exploit.
Et pourtant, Leonora et les autres sont condamnés à l’exploit en reprenant le forage vers le lac Vostok (merci à Lune pour le lien). Et alors que l’adolescente se nourrit du récit d’un de ses prédécesseurs, Veronika Lipenkova (hommage au scientifique Lipenkov avec lequel a travaillé Jean-Robert Petit ?), une scientifique russe qui ne se sentait chez elle qu’à Vostok (un récit d’ailleurs extrêmement crédible, à tel point que j’ai dû vérifier sur le Net si son récit existait vraiment. Et ce n’est pas le cas, mais sa présence, ainsi que celle de sa rédactrice à travers ses écrits, fait de « Vostok » une ode à l’aventure scientifique, celle qui transcende les différences politiques, celle qui n’a que faire des idéologies, celle qui n’a qu’un but, pur et simple : faire avancer la science), les choses vont forcément se compliquer (comme si elles ne l’étaient pas déjà !) : trahison, folie, rejet d’un lieu qui les rejettent, etc…
L’élément SF, très peu présent en dehors du personnage de Araucan, un ghost (un être étonnant dont l’origine reste mystérieuse, qui ne vit que si quelqu’un pense à lui), prend plus d’importance vers le fin du récit, en rejoignant « L’anamnèse de Lady Star », avec en prime un petit air de « sense of wonder » tout à fait agréable.
Oubliez donc l’hermétisme de « L’anamnèse de Lady Star » qui a fait peur à plus d’une personne (dont moi, mais après la lecture de « Vostok », je n’ai qu’une envie c’est d’enfin me jeter dans ce roman trop longtemps mis de côté), car « Vostok » est d’une rare limpidité. Fluide, prenant, addictif (je l’ai lu en à peine plus d’une journée, rarissime chez moi !), très bien écrit (Laurent Kloetzer sait manier les codes du thriller mais sa plume sait aussi se faire poétique, ce qui convient bien à cet environnement hors du commun), ce roman est un modèle de thriller d’anticipation, usant de belle manière d’un fond scientifique crédible et solide pour y ajouter une petite couche de SF du plus bel effet. Chaudement (haha !) recommandé !
Lire aussi les avis de Gromovar, Lune, Julien, Cornwall, Xapur, Efelle, Blackwolf, Acr0, L’Ours inculte, Charybde2.
Une très agréable lecture en effet, abordable et plaisante.
Oui, ça se lit tout seul, un vrai plaisir.
Il est noté dans ma wish list, je finirais bien par y venir ^^.
Y venir tu dois ! 😉
Ravie de voir que toi aussi tu as succombé 😉 Pour l’instant, il fait l’unanimité. C’est vrai qu’Araucan est intrigant (et le reste une fois le livre terminé, pour moi).
Mais en fait, qui n’a pas succombé ? Ça existe ? 😀
Araucan est intrigant oui, et donne de la matière pour continuer dans cet « univers »…
Encore une chronique qui fait envie… et les avis sont unanimes !!!
Je n’ai pas trop cherché mais je ne crois pas pour le moment avoir trouvé un avis défavorable. Un signe qui ne trompe pas !
Une agréable lecture pour moi. Un huis clos qui fonctionne bien.
Tout à fait.
Il donne fort envie aussi celui-ci ^^
En tout cas tu as su me convaincre !
Cool, tu verras, ça se lit tout seul. 😉
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