Les Affinités, de Robert Charles Wilson
Quatrième de couverture :
Adam Fisk s’est installé à Toronto pour suivre des études de graphisme que lui finance sa grand-mère. Là, il s’est inscrit à un programme payant pour déterminer à laquelle des vingt-deux Affinités il appartient. Adam est un Tau, une des cinq plus importantes de ces nouvelles familles sociales théorisées par le chercheur Meir Klein. Quand la grand-mère d’Adam, diminuée par une attaque, est placée dans une maison de retraite, le jeune homme n’a plus les moyens de suivre ses études. Mais être un Tau confère des avantages qu’il va vite découvrir : travail rémunérateur, opportunités sexuelles, vie sociale pleine et satisfaisante. Tout est trop beau, trop facile. Tout va très vite pour Adam… et il en est de même pour le reste du monde, car le modèle social des Affinités est en train de s’imposer. Malheureusement, dans l’histoire de l’Humanité, aucun changement radical ne s’est fait sans violence.
Réseaux sociaux puissance 1000
Meetic affinity, Edarling, etc… Des sites de rencontres par affinités. Voilà ce à quoi peuvent faire penser au premier abord les Affinités décrites dans le nouveau roman de Robert Charles Wilson. Sauf que ça va bien au-delà de ça. Les Affinités, grâce à des tests psychologiques poussés et des algorithmes de classement perfectionnés développés par une entreprise privée, permettent de classer les personnes dans certains groupes sociaux et leur permettent de se retrouver entre personnes qui se comprennent, qui se soutiennent, qui s’entendent, voire qui s’aiment.
Et cela va au-delà de l’aspect psychologique, puisque les membres d’une Affinité n’hésitent pas à venir en aide matériellement à d’autres membres de cette même Affinité. De là naissent également de nombreuses idées : prêts bancaires facilités au sein d’une Affinité, assurances, etc… Oui, l’impact sociétal de ces Affinités est fort, et définir les Affinités par rapport à ce que nous connaissons des sites de rencontres serait donc bien trop réducteur. Et le roman de Wilson, qui se déroule sur plusieurs années le démontre bien. Mais cet impact est aussi déstabilisant : certaines personnes ne peuvent être classées dans aucune Affinité, certaines Affinités sont plus « fortes » que d’autres (en terme de population et donc d’influence)… D’où une nouvelle segmentation de la population (et un fort sentiment d’appartenance) au sein même des nations à mesure que ce « méga réseau social » prend de l’ampleur.
Le roman débute avec Adam Fisk qui décide, suite à une expérience un brin traumatisante, de vérifier s’il peut être classé dans une de ces Affinités. Verdict : il sera Tau, l’une des plus importantes. Au même moment, sa grand-mère (qui lui paie ses études de graphiste et lui permet ainsi d’échapper à la pression d’une riche famille qui lui souhaitait un autre destin) tombe gravement malade, mettant en péril le fragile équilibre qu’il avait réussi à trouver. Adam va donc rencontrer la communauté Tau, ce qui va changer sa vie, mais pas seulement. Il intègre un groupe où enfin il se sent compris, comme une nouvelle famille, une famille dans laquelle enfin il se sent bien. Mais les Affinités sont un bouleversement dans la société, jusqu’à toucher à la géopolitique de la planète…
Avec ce roman, Wilson fait du Wilson. En effet, fidèle à sa façon de faire, l’auteur s’intéresse à ce qui va provoquer un séisme majeur dans notre société en restant au plus près des personnages. C’était ce qui faisait sa force, et ça l’est sans doute toujours ici, pour autant je ne peux pas m’empêcher de regretter que ce chamboulement sociétal n’ait pas été disséqué de manière plus approfondie qu’avec quelques mots au début de chacune des trois parties qui composent le roman. De même, j’aurais aimé en savoir plus sur les 22 Affinités, ce qui les définit, les différencie. Mais Wilson ne s’intéresse qu’aux Taus, et un peu aux Hets. Le reste est à peine abordé. Mais pour cela, au lieu d’un roman rythmé de 320 pages, il aurait fallu nous servir un pavé de 600 pages bien denses. Compacité et rythme versus complexité et exhaustivité, choisis ton camp camarade !
Mais le romancier a du métier, cela se sent. Rythmé, comme je le disais plus haut, le roman est d’une délicieuse fluidité, maîtrisé de bout en bout pour que le plaisir de lecture soit au rendez-vous. Passant de la découverte de son nouvel entourage par le personnage d’Adam à quelque chose de plus grande ampleur à mesure que les Affinités en viennent à menacer les fondements même de notre société (les hommes naissent-ils réellement libres et égaux avec ce nouveau système, si tant est qu’ils l’aient été un jour ?), puis virant au thriller, le roman est d’une incontestable efficacité, avec en bonus une fin bien trouvée que je n’avais pas vu venir (mais peut-être suis-je un grand naïf ? ^^).
Mission accomplie donc, malgré quelques réserves. Plus que jamais, l’écrivain canadien utilise le prétexte de profonds changements (sociaux dans le cas présent, et non plus hard-SF comme il l’a si souvent fait) pour s’intéresser avant tout à ses personnages, à l’être humain qui se cache en eux. Du Wilson tout craché, sur un thème original. Et encore une fois ça marche.
Lire aussi les avis de Cédric Jeanneret, Cyrille, Gromovar.
Je suis dedans en ce moment.
La critique suivra bientôt j’imagine… 😉
Ca a l’air passionnant en tout cas ! Peut-être que l’auteur a prévu d’autres incursions dans cet univers pour nous faire découvrir le reste ? Ce serait bien aimable de sa part :p
À ma connaissance, ce n’est pas au programme de l’auteur, mais il a largement la matière pour le faire, si l’idée lui prend !
Je le lirai peut-être. Cela dit c’est assez rare un livre trop court !
Oui, du coup c’est un reproche mais aussi un bon point : ça veut dire que ce que raconte Wilson me plaît et que j’ai envie d’en savoir plus.
Bigre quel sujet, ça donne envie !
Vaste sujet en effet !
Je suis pas très Wilson mais je suis bonne pour mettre la main sur celui-là…
Wilson, ça se lit tout seul, et celui-ci est un bon cru. 😉
Déjà sur ma PAL! Cela confirme et efface mes dernières hésitations. Merci
À consommer sans modération. 😉
Je reste un peu sur ma fin avec la non exploration par l’auteur des autres affinités.
Après, ça se lit super bien, super rythme.
J’ai bien vu la fin arrivée. Je l’ai pressenti quand Lisa lui reparle de Renata, une mise en garde finalement.
Tout pareil, sauf que je me suis fait avoir par la fin (mais tant mieux, c’est encore mieux comme ça. C’est bon d’être naïf parfois !^^).
Wilson est un excellent conteur, à chaque fois ça passe tout seul.
J’avais moi aussi adoré ce roman. Cela fait à mon sens partie des meilleurs de Wilson, et j’espère bien y voir la preuve qu’il est encore capable de nous sortir des pépites ! J’ai terminé il y a une semaine son nouveau, La Cité du Futur, et j’ai été pour le coup déçu. Je publierai l’article d’ici quelques jours.
J’aurais quand même bien aimé que l’auteur aille un peu plus loin dans l’analyse sociétale, plutôt que de se limiter à quelques affinités et/ou quelques personnages. Mais c’est tout Wilson ça : mettre des personnages ordinaires devant des situations extraordinaires.
Ceci dit, ça reste en effet un très bon roman.
« mettre des personnages ordinaires devant des situations extraordinaires. » Excellente formule pour Wilson en effet !
Je pense que sur ce roman il a la matière pour faire une suite. Mais par contre, s’il le fait, il faudra qu’il parvienne à ajouter de nouvelles idées, sans tomber dans le schéma classique d’une sorte de nouvelle guerre mondiale entre clans.
Hormis pour la trilogie Spin, Wilson n’a pas pour habitude de faire des suites, mais qui sait… Ça pourrait en effet être intéressant.
[…] Cédric, Lorhkan, […]
[…] BIOS, Spin, Julian, Les Affinités de RC Wilson – chronique de Lorkhan […]
[…] avis: BlackWolf, Lorhkan Yogo, le chien […]
[…] avis : Au Pays des Cave Trolls – Cédric Jeanneret – Lorhkan – Les Lectures d’Efelle – Les Lectures du Maki – Nébal est un […]
[…] les avis de Cédric, Lorhkan, Gromovar, Val, Celindanae, Lutin, Nebal, BlackWolf, Yogo, Le chien critique, Cornwall, Musiques […]