Royaumes d’ombre et de lumière, de Roger Zelazny
Quatrième de couverture :
Mondialement connu pour sa saga d’Ambre, Roger Zelazny ne s’est pas contenté de réinventer la mythologie celtique, comme le prouvent brillamment les trois romans au sommaire de ce volume, tous proposés dans des traductions révisées.
Dans « Seigneur de lumière » (prix Hugo 1968), sans doute son roman le plus ambitieux, Zelaznyrevisite le panthéon hindou et replace la quête mystique de Siddhartha sur une planète extraterrestre dirigée par une caste d’immortels.
Dans « Royaumes d’ombre et de lumière », il décrit loin dans le futur la lutte d’Osiris et Anubis, la vengeance d’Horus et les visions d’apocalypse d’Isis.
Dans « L’Oeil de Chat », un de ses romans les plus sous-estimés, il lance un pisteur navajo à la poursuite de la plus dangereuse des créatures intelligentes – Chat – un extraterrestre télépathe capable de changer de forme à volonté.
Roger Zelazny (1937-1995) a reçu six prix Hugo et trois Nebula pour ses romans et nouvelles. Sa disparition a privé la science-fiction d’un de ses plus grands stylistes.
Rivalités égyptiennes
Dans un lointain futur indéterminé, Anubis et Osiris règnent respectivement sur la Maison des Morts et la Maison de la Vie. Mais voici que le Prince Qui Fut Mille vient à les menacer. Les deux dieux dépêchent donc chacun un émissaire charger d’éliminer leur ennemi. Anubis envoie Wakim, son serviteur depuis mille ans, alors qu’Osiris envoie son fils Horus. Le premier qui parviendra à éliminer le Prince s’assurera la loyauté des immortels disséminés dans les Mondes Intermédiaires (l’univers connu, dans lequel vivent les hommes), et ainsi la suprématie sur l’univers dans son ensemble.
Mais c’est sans compter sur l’arrivée du Général d’Acier, défenseur des causes perdues, qui fut tué à plusieurs reprises mais ne cesse de combattre, sur Isis la Sorcière Rouge, ou bien sur les immortels Vramin le poète et Madrak le prêtre-guerrier qui ont eux aussi leur mot à dire, alors que Wakim n’est peut-être pas celui qu’il croit être…
Cette ébauche de début de résumé est volontairement obscure mais elle reflète bien l’effort que devra faire le lecteur pour s’approprier le récit. Car il n’est pas aisé d’entrer dans celui-ci, alors que Zelazny réunit de nombreuses divinités égyptiennes (Osiris, Anubis, Isis, Toth, Horus, Seth…) mais aussi certaines références à la mythologie grecque (Typhon qui est d’ailleurs le pendant grec de Seth, Cerbère, le Minotaure) dans une histoire qui, elle, ne doit rien à la mythologie. Entendez par là qu’il ne s’agit pas de la réécriture d’un mythe mais bien d’une histoire inventée par l’auteur, quand bien même il réutilise certains détails mythologiques, comme certaines rivalités ou les liens de parenté. Ces derniers sont d’ailleurs plutôt complexes, car la plupart des protagonistes entretiennent un lien de parenté, parfois même assez particulier quand l’un d’entre eux est à la fois le fils et le père d’un autre après une manipulation temporelle…
Toutefois, si on accroche, et ce fut mon cas à la puissance mille, il faut reconnaître que Roger Zelazny n’a pas son pareil pour mettre en scène et sur un piédestal ces êtres pourtant déjà divins (pour lesquels, au contraire de « Seigneur de lumière », on ne saura dire s’ils sont effectivement de « réelles » divinités ou bien des hommes ayant accédé à des technologies relevant du divin pour le commun des mortels) : abondance de majuscules (Prince Qui Fut Mille, Chose Qui Hurle Dans La Nuit), duels épiques, titanesques et destructeurs (à l’image du duel en fugue temporelle entre Wakim et le Général d’Acier), emphase stylistique, etc…
D’ailleurs l’auteur, bien connu pour cela, use d’un style particulièrement recherché dans ce roman. C’est sans doute ce que j’ai lu de lui de plus ambitieux. On est parfois plus proche de la poésie en prose que du roman, alors que deux chapitres relèvent d’ailleurs de la poésie tout court. Zelazny ne s’arrête pas là puisque qu’entre multiples petites saynètes et un chapitre final sur le mode de la pièce de théâtre, il utilise tous les artifices pour faire de son récit quelque chose d’extrêmement recherché, ambitieux, très « poseur » aussi, très théâtral en somme.
Nul doute qu’un certain nombre de lecteurs pourront trouver tout cela un peu extrême, voire même pompeux, maladroit peut-être (ce qu’il est sans doute avec ses digressions qui semblent n’avoir ni queue ni tête, ses ruptures narratives déstabilisantes, etc…) j’ai pour ma part trouvé cela fascinant et renversant. Et « Royaumes d’ombre et de lumière » a donc toute sa place dans le recueil « Seigneurs de lumière », au sein duquel il a finalement beaucoup de points communs avec le roman « Seigneur de lumière » (encore une fois sans le « s », vous suivez ?^^) écrit deux ans auparavant.
D’aucuns qualifieront ce roman d’expérimentation littéraire, de poème science-fictionnel, et ce sont des qualificatifs qui lui siéent d’ailleurs fort bien. Mais l’auteur n’oublie pas, sous cette couche de vernis stylistique et ce maquillage mythologique parfois confus, de nous livrer un histoire. Assez simple au demeurant, puisqu’il n’est question que de vengeance. Il n’en reste pas moins que j’ai pris un immense plaisir à la lecture de ce récit sans doute trop méconnu dans la bibliographie de Roger Zelazny, un de ceux que je place parmi les plus grandes réussites de l’écrivain américain.
Lire aussi les avis (sur le recueil Lunes d’Encre en entier) de Nebal, Viinz, Efelle, Yozone.
Chronique écrite dans le cadre des challenges « Morwenna’s list » de Cornwall et « Summer Star Wars, épisode II » de Lhisbei.
Mmmmh, ce recueil me tente beaucoup, mais étant donné que je n’ai encore jamais lu Zelazny, ce n’est peut-être pas la porte d’entrée idéale, je me trompe ? Dommage, car j’adore la civilisation de l’Egypte Ancienne, mais je commencerai peut-être par un morceau plus facile… Un conseil ? 😀
Alors clairement, je te déconseille de commencer par là, tu vas être perdue !
Pour débuter avec Zelazny, tu peux tenter quelques nouvelles, il y a pour ça le recueil sympathique « Une rose pour l’ecclésiaste », dont la nouvelle éponyme est très réussie (et une autre a remporté le prix Nebula). Sinon, pour un panorama plus large, le Livre d’Or de Zelazny est excellent mais assez difficile à trouver. Éventuellement, « L’homme qui n’existait pas » propose trois histoires basées sur le même personnage, la troisième est d’ailleurs excellente (et a remporté le Hugo et le Nebula).
Côté romans, tu peux essayer sans trop de soucis « L’île des morts », c’est en tout point réussi. Sinon, son oeuvre la plus connue, « Ambre », mais je ne l’ai pas encore commencée (mais ça ne saurait tarder).
Et si ça te plait et que tu es prête à te lancer dans un truc assez particulier mais vraiment génial, tu pourras essayer « Seigneur de lumière ». Mais prépare-toi bien, ça n’a rien à voir avec la SF actuelle !
Oh, et si l’heroic-fantasy te tente, avec un style pulp totalement assumé, le recueil « Dilvish le damné » vaut le coup aussi, même si le roman qu’il contient n’est pas à la hauteur des nouvelles.
Wahou, ça c’est du conseil ! Je pense du coup pencher pour un recueil (sûrement « Une rose pour l’ecclésiaste ») et un roman (« L’île des morts » me tente bien), histoire d’avoir un aperçu plus large et diversifié de son oeuvre. Un grand merci pour toutes ces références, je vais aller potasser ça en librairie. 🙂
Bonne lecture, j’espère que ça te plaira !
Je viens de voir que « L’île des morts » commence aussi à être difficile à trouver, j’espère qu’il sera réédité rapidement…
Tentant en effet, mais pour le coup, je crains de ne pas être à la hauteur. J’avais bien aimé le cycle des Princes d’Ambre mais là, ça a l’air bien perché. A tenter si un jour je me sens d’attaque. ^^
Ha, c’est sûr que ce n’est pas forcément facile d’accès, il y a de quoi être assez déboussolé.
Je commence à épuiser les possibles lectures de Zelazny (j’ai encore quelques romans en réserve tout de même), je devrais donc m’intéresser à Ambre très prochainement.
J’avais déjà ce recueil dans mon viseur mais je le mets maintenant en haut de ma wish-list, surtout vu qu’en plus il remplit les conditions du challenge Morwenna’s List !
Le recueil est composé de trois romans, seul celui-ci entre dans le challenge. Mais que ça ne t’empêche pas de t’intéresser aux autres, « Seigneur de lumière » est assez fantastique lui aussi !
Mais attention, ça reste particulier, loin de la SF moderne.
Perso je n’ai jamais accroché à Ambre et j’ai lu celui-là après Seigneur de Lumière. J’ai préféré très largement Seigneur de Lumière qui serait rigolo à adapter en BD.
Ambre, ce devrait être pour bientôt pour moi. Je vais enfin être figé sur l’oeuvre la plus connue de l’auteur.
Quant à « Royaumes d’ombre et de lumière », j’ai tendance à le mettre au même niveau que « Seigneur de lumière ».
A te lire Ambre a l’air d’un truc vraiment à part de sa bibliographie ! Faudra quand même que je lise autre chose de lui un jour ^^.
A part, oui et non. Oui parce que c’est un cycle (le seul de l’auteur si l’on excepte les deux romans sur Francis Sandow), et parce qu’il est des milliers de fois plus connu que le reste de son oeuvre.
Je voulais surtout un peu mieux connaître l’auteur pour aborder ce cycle majeur, c’est pour ça que je le mets « à part ».
Mais du coup, le tome 1 du cycle s’annonce pour septembre… 😉
Petite préférence pour Seigneur de Lumières mais je garde un excellent souvenir de mes lectures et relectures de ce roman ci.
C’est certainement un roman que je relirai avec plaisir.
[…] de James S.A. Corey, Out There, Sanshôdô de Jean Millemann, Les Gardiens de la Galaxie, Royaumes d’ombre et de lumière de Roger Zelazny, 2001 : L’odyssée de l’espace d’Arthur C. Clarke, The Incredible Hulk : […]
[…] de James S.A. Corey, Out There, Sanshôdô de Jean Millemann, Les Gardiens de la Galaxie, Royaumes d’ombre et de lumière de Roger […]
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