Godzilla, de Gareth Edwards
Godzilla. Un nom qui me fait frémir, non pas à cause du monstre en lui-même (je ne suis pas suffisamment connaisseur du « personnage »), mais plutôt à cause du douloureux souvenir du film de Roland Emmerich en 1998 avec Jean Reno… Autant dire que c’était au départ mal barré pour me faire aller au ciné voir ce nouvel opus sur la bête. Et pourtant, la science marketing du studio a fait son effet. A coup de bandes-annonces bien faites, aguicheuses et bien montées (non, n’ayez pas l’esprit mal placé…^^), insistant sur une ambiance vraiment stressante, l’envie d’aller tâter du bestiau est arrivée.
Et ça commence plutôt bien, comme souvent dans ce genre de film : tant qu’on ne voit pas la bête. Scènes d’exposition, puis dramatiques dans la longue introduction, tout cela est bien mené. Je commence à me dire que Gareth Edwards (réalisateur que j’avais apprécié dans « Monsters ») a fait du bien à la licence. Et puis… Et puis… Ça a fait pschitt…
Parce qu’après, c’est festival ! Festival d’acteurs en roue libre, notamment Ken Watanabe qui incarne un scientifique qui ne sait rien faire d’autre que froncer les sourcils tout le long du film pour montrer qu’il réfléchit (sa prestation est du niveau de Keanu Reeves dans « Le jour où la Terre s’arrêta », c’est dire !). Seul Bryan Cranston surnage, mais son rôle reste trop court…
Festival d’incohérences scénaristiques et de personnages idiots (des soldats qui inspectent des salles dans un complexe militaire à la recherche d’un monstre alors que celui-ci est sorti à l’extérieur en défonçant tout son passage, y compris la montagne dans laquelle était construit le complexe… Sérieusement… -_- Ou bien un bus qui s’arrête à cause d’un obstacle juste devant lui, obstacle qui disparaît comme par magie dans le plan suivant… Et j’en ai encore plein d’autres en réserve, mais je ne spoilerai pas), festival de déploiement militaire pour contrer la menace (chose qui ne m’intéresse pas vraiment, je pensais qu’on allait plutôt s’intéresser aux personnages comme l’avait si bien fait le réalisateur dans son film précédent), festival de premier degré pour un film qui n’a pas l’intelligence de jouer la série Z assumée comme l’avait réussi « Pacific Rim », festival d’explications (ou plutôt d’approximations) scientifiques improbables, festival de personnages inintéressants dont on se fout ou presque (et les femmes, mon dieu les femmes… Déjà on les compte sur les doigts d’une main, et leur rôle est réduit de la figuration de femme éplorée, gardant les enfants, etc… C’est d’une tristesse…), etc… Gareth Edwards tente également de recycler quelques petites choses déjà vues dans « Monsters », tel le « câlin monstrueux », mais autant ça fonctionnait dans ce dernier (et avait une réelle signification), autant ici ça tombe à plat. Preuve d’un manque d’idées ?
Ceci dit, tout n’est pas à jeter heureusement, quelques belles scènes planent au-dessus du lot (le superbe saut halo par exemple, déjà vu dans la bande-annonce), et techniquement bien sûr, ça envoie du lourd. La réalisation globale est d’ailleurs vraiment à la hauteur, et les combats sont vraiment bien filmés. Le symbolisme du film est intéressant (bien qu’asséné à coup de marteau dans la tête des spectateurs, au cas où ceux-ci seraient idiots…), Fukushima bien sûr, le 11 septembre au détour d’une image, et la puissance de la nature, incarnée par un Godzilla qui oublie qu’il dispose de quelques bottes secrètes, sauf à la fin du film, forcément…
Alors j’ai envie de dire tout ça pour ça !… J’ai été voir ce film peu de temps après « The Amazing Spider-Man 2 », et j’ai trouvé ce dernier bien moins long que ce « Godzilla » qui dure pourtant vingt bonnes minutes de moins… Ça se prend trop au sérieux pour moi. Quitte à voir un bon gros film de monstres qui tache (car elle est partie loin la subtilité de « Monsters »…), j’ai nettement préféré la bonne humeur assumée d’un « Pacific Rim » par-un-geek-pour-les-geeks. Peut-être est-ce ma faute, peut-être me suis-je fourvoyé en m’imaginant aller voir quelque chose de différent, mais pour moi « Godzilla » est la démonstration indécente qu’il est facile de duper le spectateur avec un marketing bien mené. Mais également que l’idée d’embaucher un scénariste ne semble toujours pas avoir fait surface chez les fabricants de blockbusters. À moins que, chez les mutants… 😉
Je suis d’accord avec tout ce que tu dis ^_^.
Oui, ça m’a bien fait rire le coup du gros obstacle qui disparaît au plan suivant (et là, c’est le réalisateur qui est en cause, même pas le scénariste).
Et merci de parler des femmes, c’est un des éléments les plus affligeants du film, on se croirait revenu dans des films d’il y a 30-40 ans tellement elles sont creuses, inutiles et, surtout, absentes… C’est vraiment affligeant.
Du coup, faut-il sauver les belles scènes. Par ce que bon, il faut quand même dire qu’au niveau action, c’est vraiment pas mal. Mais peut-on réussir à oublier tout le reste juste pour profiter de cette action? Je n’ai pas su…
Faut-il sauver les belles scènes ? Bonne question, mais je dois dire (et je pense que ça se sent dans mon billet) que je pense avoir fait mon choix : malheureusement pour Gareth Edwards, tous les défauts scénaristiques et de caractérisation des personnages gâchent le film…
Parler d’absence de scénaristes sur ce genre de films est un peu un nonsense: il y a pléthore de scénaristes… mais c’est le commercial qui décide à la fin ce qu’il faut garder 🙂 En même temps, le scénariste qui doit bosser pour Godzilla, il a un carnet de charge qui comporte un bon tiers de scènes d’action où il se contente de mettre « scène d’action ». C’est pour cela que j’ai du mal avec ce genre de cinéma: l’histoire est globalement un prétexte et c’est presque du bol quand elle tient bien debout.
Alors peut-être est-ce Gareth Edwards qui, du fait de sa jeunesse, n’a pas su imposer sa vision aux producteurs ? C’est tout à fait possible, et d’autant plus dommageable que ce gars est bourré de talent… J’espère vraiment qu’il ne deviendra pas un Yes Man. Il est déjà nommé réalisateur d’un spin-off sur Star Wars, ce sera le prochain grand test.
Ensuite, je pense toujours qu’il est possible de servir aux spectateurs un blockbuster qui ne les prend pas pour des idiots. Je ne cherche pas forcément un film avec zéro incohérence (y en-a-t’il vraiment dans les blockbusters ?), mais à un moment trop c’est trop, et on dépasse mon taux d’acceptation (et je suis pourtant bon public, donc ce taux est assez élevé chez moi…^^).
Parce que des blockbusters « intelligents », ça existe : Matrix, Minority Report, Inception, District 9, Blade Runner, Starship Troopers, le Mission Impossible de De Palma (avis purement personnel bien sûr…). Et puis le nouveau X-Men a aussi l’avantage de ne pas prendre le spectateur pour un idiot.
Je suis d’accord avec la liste. Mais on remarquera que ces films ne sont pas basés sur l’action mais sur une histoire qui contient des scènes d’action. Pour un Godzilla, le spectateur vient voir un monstre qui casse des trucs de manière spectaculaire. Pour qu’il y ait un bon scénario il faut vraiment que les producteurs et le metteur en scène aient la volonté de partir d’une vraie histoire. Il faut voir que l’on parle d’industrie avec des impératifs de rendement et d’énormes sommes investies – particulièrement dans la com’. On fait probablement le budget com avant d’écrire une ligne de scénario.
Dans cette optique, j’évite les films de super héros: le public visé veut voir de l’action et faire autre chose est une vraie gageure – sans compter que je m’ennuie de plus en plus sur les scènes d’action – ça doit être l’âge.
Rien n’empêche d’écrire une histoire potable dans « Godzilla », sans avoir à empiéter sur les scènes d’action « obligatoires » dans ce type de film. Tu as raison, c’est certainement une histoire de volonté, et comme ces films sont des succès malgré le vide abyssal de leur scénario, on n’est pas prêt de voir des trucs plus ambitieux, sauf si le réalisateur à un certain poids dans l’industrie, et s’il a une vision qu’il souhaite imposer. Visiblement pour Gareth Edwards, ce n’était pas le cas (aussi bien pour le poids que pour la vision, encore que sur ce dernier point ça reste à discuter).
Par contre, pour les films de super-héros, il y a encore de l’espoir, le nouveau X-Men le démontre. Mais il est vrai que c’est Bryan Singer qui est aux commandes, un réalisateur important, qui aime cette franchise (il a réalisé les deux premiers, et a décidé de reprendre la mais sur cette saga) et qui sait où il veut aller. Tu seras ravi d’apprendre que les scènes d’action sont loin d’être majoritaires. 😉
Critique mercredi. 😉
Mis à part quelques scènes époustouflantes il n’y a en effet rien à sauver dans ce film.
Hélas…
RIP Bryan Cranston.
Je ne vais pas le clouer au pilori pour ce film, c’est d’ailleurs le seul acteur qui tiens à peu près son rang même si son rôle est plutôt restreint. Pour autant, ce n’est sûrement pas ce qu’on retiendra dans sa carrière, hein !^^
Pour une fois, je n’aurais quasiment rien à ajouter à une chronique de blockbuster. Je dis ça parce que je trouve que les chroniqueurs ont souvent la dent dure ou surtout des attentes invraisemblables vis-à-vis du type film en question, mais là j’approuve. Tout le drama familial est dur à supporter et plombe assez souvent le reste. Des bêtises de mises en scène ou des beauferies aussi extrêmes que la visite du complexe militaire sus-mentionné sont immanquables…mais voilà, trilogie annoncée ! Et Pacific Rim, largement plus méritant ? On verra.
On en avait déjà parlé sur le dernier « Star Trek » mais j’ai toujours tendance à être un minimum exigeant avec les blockbusters (mais il y a bien pire que moi !). Parce que si on laisse passer trop de choses, ce n’est pas comme ça qu’Hollywood fera des efforts pour nous offrir quelque chose de présentable niveau cohérence, scénario et personnages.
Ok, techniquement, avec les moyens que les « gros » producteurs mettent dans les films, c’est très souvent bluffant. Est-ce pour autant qu’on doit prendre le spectateur pour un débile ? Je ne crois pas, et si personne ne dit rien sous prétexte qu’on est en présence d’un blockbuster, autant te dire que c’est un aspect qu’ils vont finir par totalement négliger (encore plus que maintenant !).
Donc non je ne suis pas débile (il me semble), et j’aimerais qu’Hollywood (je suis sûr qu’ils lisent mon avis là-bas) en tienne compte.
Et pour « Pacific Rim », oui ne serait-ce que pour le second degré pleinement assumé. Ce n’était pas non plus le film de l’année (je l’ai d’ailleurs bien souligné dans ma critique), mais il avait un côté régressif assumé, comme une reconstitution des batailles qu’on faisait avec des figurines, étant gosse. Le bateau-batte de baseball, les réacteurs de coups de poing, c’était quand même quelque chose ! Et puis Ron Perlman en trafiquant d’organes de kaijus, au look improbable, ça avait de la gueule. Autrement plus que ce déballage d’arsenal militaire offert par « Godzilla ».
Bon, moi, le truc qui m’a le plus chiffonnée, c’est le côté pseudo-scientifique sur ces anciennes créatures se nourrissant de radiations et vivant au fond de la mer avec des corps hyper costauds et des narines clairement faites pour respirer à l’air libre. Mais décidément je ne résiste pas aux reptiles géants qui prennent des poses symboliques signifiant « ET C’EST QUI LE PATRON??? » et j’ai exulté à chaque apparition de Godzilla. Même les demi-apparitions m’ont semblé malines, par ex. quand la porte d’un abri souterrain se ferme et que les derniers arrivants entrevoient une seconde ce qu’il se passe à l’extérieur…. Et la poussière qui se referme sur le visage de Godzilla lors de son (apparente!!) destruction m’a beaucoup émue. Mais bon je vois bien ce que tu lui reproches. Je ne sais pas même pas comment je peux faire abstraction de tout ça en fait… 🙁 🙂
Oui tu mets le doigt sur les bons côtés de ce film : la réalisation, qui est clairement à la hauteur.
Le reste ne suit pas, malheureusement, et ça m’a fait sortir du film.
J’aime bien les films décérébrés, les trucs qui te pètent à la tronche sans jamais en appeler à ton cerveau, mais juste à ton côté primaire. Tu le sais bien d’ailleurs Lorhkan. ^^ Mais là en l’occurence, le film se prend trop au sérieux pour que j’ai pu y adhérer. Que ce soit débile, que ce soit totalement improbable, ça ne me dérange pas, mais que ça soit larmoyant, faussement épique et faussement dramatique, là, non. Bref, je retiendrai le début du film, qui laissait croire à quelque chose de sympa, et les immeubles qui pètent. Enfin, je retiendrai ça pendant deux ou trois jours mais après, y a des chances pour que le film disparaissent dans les limbes de mon esprit encombré et torturé. ^^
Et il y a de fortes chances qu’à travers ce commentaire, tu sois la sagesse incarnée mon cher Hiro ! 😉
Mouais vu au ciné, bof même pas eu le courage de le chroniquer. Voilà, un peu pareil quoi.
Oui, beaucoup de bruit pour pas grand chose. Mais je garde un oeil sur le réalisateur, on verra ce qu’il fera sur la saga Star Wars…
Grosse déception pour moi aussi. Visuellement très beau, mais scénaristiquement très creux et bourré d’incohérences.
Hé oui, malheureusement…
Un personnage principal inexistant, voilà ce qui pour moi plombe le film. Je le dis avec d’autant plus tristesse que j’ai adoré le look de ce Godzilla… mais quel dommage que du côté des humains la caractérisation soit moins réussie que celle des monstres ! Un comble…
Tout à fait, un beau gâchis à ce niveau…