Pacific Rim, de Guillermo del Toro
Attendu de longue date, « Pacific Rim » arrive enfin sur nos écrans ! J’avais été franchement emballé par les premiers trailers qui semblait matérialisé un rêve de gosse : voir « en vrai » des combats de robots et de monstres géants, le genre de truc qu’on ne voyait qu’en manga ou en anime (« Goldorak » en étant le représentant le plus connu), on qu’on simulait avec nos jouets d’enfants. Bref, un truc qui fait appel à la fibre nostalgico-geek, mais pas que… Et c’est peu de dire que voir Guillermo del Toro, réalisateur un brin atypique à l’univers si particulier, mélange d’imaginaire débridé et de considérations très humaines, diriger ce film permettait d’y croire très fort. Et le résultat est à la fois à la hauteur et à la fois décevant.
Allons tout de suite à l’essentiel et débarrassons nous de l’évidence : oui, visuellement, c’est à tomber par terre. C’est un peu la même rengaine à chaque blockbuster, mais pourtant il faut bien avouer que l’échelle des combats des Jaegers (les robots géants pilotés par un couple d’humains) contre les Kaijus (les monstres) est réellement impressionnante. On a maintenant l’habitude des scènes urbaines de destruction massive, mais voir un robot combattre un monstre en utilisant un bateau pétrolier comme batte de baseball, ou bien utilisant un « réacteur de coude » pour donner plus de puissance à un coup de poing, ça fait son petit effet !
La photographie du film est elle aussi superbe, à la fois sombre et brillante, jouant à merveille sur l’atmosphère de ces combats titanesques. Pluie, obscurité, on est loin de combats clinquants et bien propres, l’ambiance s’en trouve magnifiée ! Malheureusement, la lisibilité des combats s’en ressent, je les ai trouvés particulièrement peu lisibles. Voir ces monstres s’affronter et rendre compte de leur taille n’a pas dû être une mince affaire, et le résultat à l’écran n’est pas optimum, c’est bien dommage.
En revanche, là où je suis un peu moins enclin à pardonner, c’est sur les clichés que véhicule le film. Je pensais pourtant pouvoir les éviter avec del Toro aux commandes, mais ce n’est qu’en partie vrai. Un réalisateur mexicain, une action qui se passe en grande partie à Hong-Kong, un genre qui fait plus qu’ouvertement référence à la culture japonaise (avec en plus la jolie Rinko Kikuchi en pilote de Jaeger), tout cela augurait d’un joli renouveau dans le petit monde un peu vicié des blockbusters américains. Alors certes on évite la mise en avant des États-Unis (encore que, qui sauve le monde ?…), mais le trop grand nombre de clichés (qui semblent malheureusement devenus un passage obligé dans les films à gros budgets) m’ont passablement énervés. On va du traditionnel discours de motivation des troupes au sacrifice du soldat au grand coeur, du pseudo-suspense sur la fausse mort du héros au jeune pilote doué mais arrogant, du duos de scientifiques un peu fous au ciel joliment bleu après la bataille. Tout un tas de poncifs déjà vus mille fois, parfois même illustrés avec tellement d’emphase que ça en devient lourdingue (le soldat qui vient de sauver une petite fille, sortant du Jaeger sur fond de lever de soleil, au secours !! Surtout que l’identité du-dit soldat se devine à des kilomètres…). On peut penser que tout ça est une référence et un hommage à la pop-culture, aux comics/mangas, etc… Mais c’est déjà vu tant de fois que ça devient grotesque. « Pacific Rim » est un film pop-corn qui s’assume, aucun doute là-dessus, mais on peut faire du pop-corn sans toujours tomber dans les mêmes poncifs, non ?
La casting remplit son rôle, pas de grosse tête d’affiche, mais certains acteurs sortent du lot comme Rinko Kikuchi ou bien Idris Elba qui fait ici preuve d’une belle autorité. Les personnages ne sont pas d’une folle complexité (et sont parfois très caricaturaux, comme le jeune pilote égocentrique ou les scientifiques timbrés, ou très transparents comme le héros incarné par Charlie Hunnam, véritable coquille vide), mais le tout reste sympathique à suivre. Citons tout de même l’apparition marquante de Ron Perlman, l’acteur fétiche du réalisateur, en caïd du marché noir des organes de Kaijus, à la fois drôle et iconique. del Toro et Perlman font la paire, pas de doute là dessus !
Côté scénario, il y a du bon dans la densité du background, qu’on devine bien plus important que ce ne montre le seul film (ce que semblent confirmer la sortie d’un comics et l’existence d’une « bible » sur l’univers du film), et l’introduction est un modèle du genre : elle pose le contexte et les enjeux rapidement, efficacement, pour mieux embrayer sur l’intrigue en elle-même. L’intrigue qui, elle, en revanche, n’est pas bien épaisse, mais on s’y attendait un peu. Et j’ai envie de dire que si on va voir « Pacific Rim », c’est pour voir des robots et des monstres géants se foutre sur la tronche. Mission accomplie de ce côté-là, mais dommage que certaines idées du film ne soient pas plus explorées, comme la Dérive (relevant clairement du « Inception » de Christopher Nolan), autrement dit le fait que les deux pilotes d’un Jaeger partagent leur esprit alors que c’est justement dans une scène qui développe cet aspect que l’émotion monte d’un cran (en insistant sur les cauchemars d’enfants, etc…). Et la meilleure actrice du film se trouve justement dans cette scène : mention très bien à la petite Mana Ashida.
Donc c’est vrai que j’en sors un peu déçu, par certains côtés que j’espérais gommés par le réalisateur. Mais même si ça n’a pas été le cas, je suis bien obligé de reconnaître qu’on en prend plein la tête, que c’est un rêve de gosse, un fantasme de geek qui se voit transposé sur grand écran, et que malgré les maladresses je ne peux qu’avoir une grosse dose d’affection et de tendresse pour ce film, que j’apprécie finalement autant pour ses qualités que pour ses défauts. N’oublions pas non plus qu’il ne s’agit pas d’une sempiternelle suite d’une franchise déjà (trop) installée, sans tête d’affiche pour faire venir les foules, avec un univers et des références à un genre qui peut laisser de marbre nombre de spectateurs. C’est incontestablement un pari risqué, et qui mérite d’être salué comme il se doit. En bref, c’est bourré de clichés, mais qu’est ce que c’est bon !
Lire l’avis d’A.C. de Haenne.
Je te suis totalement et tu m’en vois d’ailleurs foutrement tourneboulé. Je pense que je vais finir par copier tes billets sur mon blog, en rajoutant quand même des gros mots et des « fête du slip » ou autres « foire au pâté » histoire de donner le change. ^^
Non, j’ai été à la fois gêné par les grosses ficelles de blockbuster que tu cites tout en jubilant par moments en découvrant des méchas géants exploser des diplodocus…
Ben voilà, c’est toujours la même rengaine : tout pareil !
Et prout aussi, pour donner le change. 😉
J’ai un peu le même problème que Hiro, mais j’ai trouvé un truc: j’écris mes billets avant ceux de Lorhkan. 🙂
Ah ça, c’est encore la meilleure solution ! 🙂
J’ai longuement hésité à le chroniquer. Moi qui ne vais plus voir ce genre de film parce que les scènes d’action m’ennuient, j’ai trouvé ces dernières très agréables… et bien plus intéressantes que le scénario. Qui du coup aurait permis un solide décryptage.
Rapidement: écrit probablement par et pour des gamins de 10 ans tendance Transformer, il a visiblement été rendu visuellement plus sombre en espèrant ratisser plus large mais. Mais les rapports humains nous rappellent la belle époque de Tintin. Vous savez cet univers étrange où les gens n’ont ni parent, ni enfant, ni petite amie.
Dans PacificT, les héros sauvent l’Humanité… sauf qu’on ignore exactement ce qu’est l’Humanité puisqu’ils ne semblent avoir aucune famille. AUCUN des personnages n’a de sexualité: il n’y a ni femme ni petite amie – ni mec ni mari. Comment font-ils des enfants ? Ils les ADOPTENT (cf. le boss black)! Ou alors, il les font tout seul (cf. le vieux soldat et son fils frimeur). D’ailleurs les ET ont bien compris la chose puisqu’ils fabriquent des clones. Et le comble du comble: la scène finale, les deux héros sur l’océan qui se rapprochent… se rapprochent… se rapprochent. Et se prennent dans les bras. Pas de baiser – tant pis je spoile mais c’est bien fait pour vous. 10 ans d’âge mental. Les deux scientifiques fous sont clairement issus d’un fantasme juvénile – de quelqu’un qui ignore à quoi ressembler un vrai microscope et un vrai labo…
Il paraît que Spielberg a inventé le concept de blockbuster avec Jaws. Un truc pour ado/adulte. Ensuite, le cinéma pour ado a phagocyté quasiment tout Hollywood. Mais je n’aurai jamais imaginé voir le cinéma pour préadolescents prendre la pouvoir. Prochaine étape ? Les Télétubbies sauvent l’Humanité ! J’ai hâte d’y être…
Sinon, j’ai aimé dans les combats le fait qu’ils se déroulent presque au ralenti par rapport au cinéma d’action actuel qui privilégie une action déstructurée hystérique. Clairement un film pour faire vendre du popcorn et des jouets. Et les gens se plaignent de TF1 ? Ils sont fous les gens.
Voilà, pendant les deux heures du film, je suis redevenu ce gamin accro au Club Dorothée. Sauf qu’au lieu d’avoir un anime japonais, j’ai eu un blockbuster live. D’où une certaine jouissance, mais aussi un degré zéro sur l’ambition scénaristique.
Mais j’ai aimé quand même. Vraiment.
Je peux comprendre le plaisir régressif mais c’est toujours déprimant de voir cette course à la simplification. «Heureusement», le film n’a pas très bien marché aux States.
Ok pour le plaisir régressif mais si ça avait été un dessin-animé, même projeté au cinéma, personne n’aurait rien dit… Quelque part c’est dommage de le descendre parce que c’est un film et pas un dessin-animé, parce qu’au fond c’est sans doute ça le problème. Mais film ou dessin-animé même combat. On peut faire du sérieux avec un dessin-animé, les exemples sont légion, tu es bien placé pour en parler. Et on peux faire du léger avec un film, là aussi les exemples sont légion, sans doute trop, d’où ton agacement que je comprends tout à fait.
Maintenant, en tout cas pour moi, Pacific Rim touche à une fibre bien particulière de ce qui a « fait » ce que je suis aujourd’hui, d’où mon enthousiasme malgré les défauts du film qu’on ne peut objectivement (si c’est possible) pas passer sous silence. 😉
Et, si Pacific Rim avait été un dessin animé, je pense qu’on le lui aurait également reproché. Une certaine frange de la critique ciné l’aurait descendu parce que les dessins animés, c’est un truc pour gamins.
Et j’ajoute que je trouve dommage moi que le film n’ait pas marché aux États-Unis. Parce que ce Pacific Rim est un peu sorti de nulle part (c’est à dire pas une franchise qui nous propose une énième déclinaison de son univers), et ne nous agite pas devant le nez un Tom Cruise ou un Brad Pitt pour attirer les foules. Un peu de fraîcheur dans le monde des blockbusters, ce n’est déjà pas rien… 😉
Déçue par la même chose que toi.
Et c’est la déception qui prédomine ? Parce que je suis déçu sur certains points, mais je reste enthousiaste !
Oui et non. Les belles images ne me suffisent plus même si il y a de quoi prendre son pied dans Pacific Rim. Les scénarios bancals et tenant en deux lignes, à la rigueur passe encore mais je suis considérablement blasée par tous ces films aux personnages féminins fades, absents, potiches ou faire valoir des héros masculins.
Je comprends… Il y a de quoi être frustré en effet…
À propos de « certains critiques »… Télérama a écrit « un film qui marie Freud avec les blockbusters » (ce qui a motivé mon analyse parce que question freudisme, c’est un film sans « sexualité » justement) et Le Figaro « Del Toro est le chaînon entre Cameron et Bunuel ». Ils ont beaucoup aimé tous les deux.
Question dessin animé, je n’y vais plus non plus, fatigué des scénars familiaux et des prouesses 3D.
Bon alors s’ils ont aimé, tant mieux, mais alors Freud, il faut vraiment bien le chercher là, et Bunuel aussi d’ailleurs ! 😀
Pour les dessins animés, malheureusement chez nous, les dessins animés « sérieux » ne font pas recette… Dommage vu que certains long-métrages japonais vont très largement au-delà du cercle enfant-adolescent (voire même l’excluent totalement pour les plus durs)…
ouais ben moi c’est comme Hiro et Alias, j’vais finir par faire « alors mon résumé, aller voir chez Lorkhan, c’est tout pareil pour moi. » x) heureusement qu’on voit pas forcément les mêmes choses systématiquement, sinon je ferais un récap’ du moi avec que des billets d’autres !
(bon, j’ai déjà dit que j’étais flemmarde mais quand même.) :p
Héhé, c’est le problème des films très attendus, il y a souvent bousculade pour l’écriture des chroniques ensuite… 😉
huhu ben tu vois, je viens de le faire mais pour Man of Steel… x) que je pensais d’ailleurs avoir chroniqué chez toi, mais mon commentaire a du se perdre quelque part… :'(
Malheureusement, je ne trouve pas trace de ton message, ni en indésirable, ni en corbeille, ni en attente… Il a dû se perdre dans les limbes… J’espère que tu n’avais pas écrit un pavé !
*gnéhéhé, peut-être que j’ai fait exprès pour te forcer à écrire ta chronique, ça c’est fourbe !* 🙂
Blague bien sûr ! 😉
C’est clair que les clichés peuvent être énervant, mais j’ai trouvé qu’ici ils servaient presque le film. Pour ma part, j’en ai pris plein les mirettes, même en 3D. Et pourtant, c’est peu de dire que je ne suis pas fan du pseudo « relief ».
A.C.
C’est comme un rêve de gosse, et dans ce cas là, on est prêt à pardonner beaucoup de choses… 😉
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