La Zone du Dehors, de Alain Damasio
Après « La Horde du Contrevent », voici ma chronique du premier roman de l’auteur, Alain Damasio. Brouillon d’avant chef d’oeuvre, ou roman déjà remarquablement maîtrisé ? En tout cas, Damasio ne fait pas dans la demie mesure, tant au niveau du style, que de l’engagement politique…
Quatrième de couverture :
2084. Orwell est loin désormais. Le totalitarisme a pris les traits bonhommes de la social-démocratie. Souriez, vous êtes gérés ! Le citoyen ne s’opprime plus : il se fabrique. A la pâte à norme, au confort, au consensus. Copie qu’on forme, tout simplement. Au coeur de cette glu, un mouvement, une force de frappe, des fous : la Volte. Le Dehors est leur espace, subvertir leur seule arme. Emmenés par Capt, philosophe et stratège, le peintre Kamio et le fulgurant Slift que rien ne bloque ni ne borne, ils iront au bout de leur volution. En perdant beaucoup. En gagnant tout. Premier roman, ici réécrit, « La Zone du Dehors » est un livre de combat contre nos sociétés de contrôle. Celles que nos gouvernements, nos multinationales, nos technologies et nos médias nous tissent aux fibres, tranquillement. Avec notre plus complice consentement. Peut-être est-il temps d’apprendre à boxer chaos debout contre le swing de la norme?
Un sacré coup d’essai !
« La Horde du Contrevent », deuxième livre de l’auteur mais premier dans mon ordre de lecture donnait dans le philosophique. Et m’a littéralement subjugué.
Celui-ci fait dans la SF politique. Changement de ton donc, mais on découvre également un Damasio au style plus… brouillon si l’on peut dire. En effet on sent les prémices de ce qui fera date avec son deuxième roman : la polyphonie stylistique, des néologismes en veux-tu en voilà, des signes typographiques prépondérants, etc… Sauf qu’ici c’est moins maîtrisé que dans « La Horde ».
Quant au propos, là soyons clair, on est dans du très engagé. On nous décrit une société où la vie des citoyens est contrôlée sans que ceux-ci s’en aperçoivent (ou ne veulent s’en rendre compte, car au fond, peut être sont-ils vraiment heureux ?…), « contrôle optimal avec une impression de liberté totale » dixit le Président de Cerclon, cette ville bâtie sur un astéroïde. Société image de la nôtre, finalement, volontairement exagérée (les citoyens ont des noms reflétant leur statut social : plus il est court, plus le citoyen est important), mais qui sait, peut être pas tant que ça…
L’auteur s’engage intelligemment, en pesant bien le pour et le contre. Tout n’est pas rose chez les anarchistes regroupés au sein de la « Volte », et qui veulent changer la société, faire la « volution », et les questions éthiques ne manqueront de faire débat… Faut-il utiliser la violence ? La fin justifie-t-elle les moyens ? Autant de thèmes traités avec justesse, et passion. Car on sent la passion qui anime l’auteur, son sang qui boue. Il ne s’en cache d’ailleurs pas dans la postface du roman.
Là où le bât blesse, c’est que parfois l’auteur oublie qu’il écrit un roman, et certaines parties en souffrent, tant la démonstration vire à l’essai philosophique, nouvelle faille qui sera totalement gommée dans « La Horde du Contrevent »… Lors de ces périodes, mieux vaut avoir l’esprit bien éveillé, sous peine de perdre le fil très rapidement. La confrontation entre Capt et le Président A en est un bon exemple.
L’ouvrage est donc passionnant (la dernière partie utopique du roman, très réussie), mais parfois difficile d’accès, palpitant (la scène de l’attaque de la tour de télévision, absolument géniale !) mais parfois confus. Avec un peu plus de maîtrise, on tenait là encore un chef d’œuvre, mais en gardant à l’esprit que Damasio a écrit ce premier roman à l’âge de 30 ans, on pardonne bien des choses… Et de toute façon le chef d’œuvre est arrivé avec le roman suivant…
Chronique réalisée dans le cadre du challenge « Summer Star Wars Episode V » de Lhisbei.
Tu m’as grillé, j’en suis encore qu’aux 100 premières pages ! Il est resté en plan en raison d’une gestion chaotique de mes lectures 😀
si la Zone a un côté plus brouillon, avec en effet des morceaux philo-politique assez long, j’en ai gardé quand même un excellent souvenir (au point d’ailleurs de l’avoir acheté pour le relire – ce que je n’ai pas encore fait). C’est une dystopie qui tranche par sa modernité et son ton. je l’ai lu il y a des années et je suis incapable de te dire l’histoire, mais par contre, je me rappelle précisément de certaines scènes marquantes, le frisson notamment de savoir comment se révolter, et du choix de mettre ou nom des lames sur les portes. En moins, j’ai pas accroché à son trip du labyrinthe.
Ce que j’ai adoré dans ce récit, c’est ce sentiment de jouissance, de vie à l’état brut, cette « volte » qui emporte le lecteur avec lui (en tout cas moi). Cette exaltation de la révolte.
Comme pour la Horde, Damasio est très doué pour faire ressentir et vivre des choses fortes, malgré un style élevé, et ça je trouve ça très fort. Et je n’ai connu ça qu’avec lui. Pas pour rien si je suis fan gniii XD
@Guillaume : 😉
@lael : qu’on ne s’y trompe pas, moi aussi j’ai beaucoup apprécié ma lecture, mais j’ai trouvé « La Horde » plus aboutie. Mais si on aime la SF engagée (et de gauche), cette lecture ne peut qu’être marquante.
C’est vrai que la notion de « volte » y est intéressante et très développée, la vie par le mouvement, là aussi un thème de « La Horde ».
ben faudrait que je le relise pour être sûr mais il m’a semblé avoir un ton assez propre (malgré ses similarités avec la Horde), et si c’est indéniablement révolutionnaire, pourquoi de gauche absolument ?
Sinon je trouve pas la Horde particulièrement plus aboutie (même si oui, on sent une différence parce que c’est le deuxième livre écris).
Non mais il est bien écrit, hein, pas de problème de ce côté là, simplement certains aspects pas toujours très heureux ont été gommés par la suite (par exemple l’aspect « je me regarde écrire »).
Damasio n’a jamais caché son orientation à gauche, et ça se ressent quand même un peu au fil de la lecture. « La Volte » est quand même un mouvement gauchiste, la dernière partie du roman l’illustre bien. 😉
ben alors c’est ptet parce que je partage son point de vue que ça ne me choque pas lol mais j’ai du mal à dire que tel livre puisse être gauchiste. jveux dire, la SF c’est un peu toujours ça non ? se révolter contre un système dictatorial, chercher la tolérance et la compréhension plutot que le bourrinage (bon d’accord, là ça dépend quelle SF).
Ah mais ça ne me choque pas non plus ! D’autant plus qu’on n’est pas dans l’aveuglement : le mouvement de la Volte est remis en cause, du bien fondé de ses actions jusqu’à son leitmotiv même (la scène de Capt dans le supermarché est assez éloquente à ce sujet).
Par contre, la SF de droite ça existe et pas qu’un peu : SF militariste notamment, mais pas seulement. Y compris dans la SF française. Mais ceci est un autre sujet… 😉
oui exact, ce que j’aime dans un bouquin comme celui ci c’est la remise en cause, tout est critiqué.
Ben sinon j’suis jamais tombé sur cette SF là. T’aurais des exemples ? Parce que la SF « militariste » que j’ai pu voir ou lire (là je pense à Stargate), tu vois le côté militaire qui colonise mais c’est pour dénoncer plutôt. Starship tropper à la limite si tu le prends au premier degré. Mais sinon je vois pas…
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