Au nord du monde, de Marcel Theroux

Posted on 25 avril 2014

La lecture commune du mois de mars sur le Cercle d’Atuan m’a donné l’occasion de m’intéresser à ce roman qui à reçu le Prix de l’Inaperçu en 2011. Quand on voit le nombre de critiques le concernant sur le web, on se dit qu’il n’est pas passé si inaperçu que ça, à moins que ce ne soit l’effet du prix… Mais peu importe, ce n’est pas le sujet. Voyons plutôt de quoi il retourne…

 

Quatrième de couverture :

« Ici, dix mois par an, le climat mord la peau. Le silence règne, désormais. La ville est plus vide que le paradis. »

Au nord du monde, la terre s’étend à perte de vue, anéantie par un cataclysme. Parmi les décombres, le shérif Makepeace erre. La route porte ses pas, à la recherche d’un temps qui n’existe plus et d’une humanité à reconstruire. Ravivant à l’horizon la lueur d’une rédemption… Un roman visionnaire et obsédant sur la beauté du monde et sa fragilité.

 

Post-apo mais pas trop

Au nord du monde - TherouxÉtrange roman que ce « Au nord du monde » (« Far North » en VO, joli titre !). Se situant dans un futur non daté chronologiquement, après une catastrophe mondiale qui ne sera jamais vraiment explicitée, le roman nous présente un monde déprimant dans lequel personne n’aurait envie de vivre. Et pourtant. Nous suivons les pas de Makepeace, shérif de la petite ville où il habite. Marcel Theroux ne dévoile ses cartes que petit à petit, et garde ainsi le suspense sur le lieu de l’action, entre autres choses. On finit ainsi par apprendre (assez rapidement je vous rassure) que l’action se passe en Sibérie. La ville de Makepeace est quasiment entièrement dépeuplée, vestige de la civilisation et surtout d’une utopie en laquelle croyaient quelques colons.

On pourrait donc penser avoir affaire à un énième post-apo déprimant, ne rencontrant que quelques humains dangereux, avec un héros luttant pour sa survie. Et c’est ce qu’on a, mais pas de la manière habituelle. Car le récit, narré à la première personne, ne fait curieusement pas dans le dépressif. Makepeace va pourtant traverser un certain nombre d’épreuves pour le moins traumatisantes, entre mort, désespoir, suicide, esclavage, religion extrémiste, etc… Mais la narrateur a un ton, une voix bien particulière qui laisse toujours un fond d’espoir en une vie meilleure, une amélioration de la nature humaine.

Il n’y pourtant pas de quoi se réjouir quand au fil du récit on découvre l’histoire personnelle de Makepeace, mais l’écriture finement ciselée de Theroux fait des merveilles pour maintenir le récit au-dessus d’un ton dépressif qui va trop souvent de pair avec le post-apo. Ainsi la quête de civilisation de Makepeace (suite à un événement qui lui fait prendre conscience de certaines choses, je n’en dis pas plus) l’amènera à faire pas mal de rencontres, souvent mauvaises mais parfois aussi « lumineuses » (entendez par là que ces rencontres sont chéries dans ce monde à la dérive). La narration à la première personne nous fait vivre pleinement le ressenti du personnage sur la vie, la mort, l’avenir, etc… Les réflexions sont intéressantes et toujours bien amenées, bien écrites.

Alors post-apo, oui bien sûr, mais un post-apo qui nous plonge dans l’intimité d’un personnage complexe et sensible, un post-apo beau et cruel à la fois. Un post-apo qui ne fait pas dans le sensationnel (bien qu’il réserve son lot de surprises), qui joue plus sur les personnages que la situation. Mais surtout un post-apo qui marque d’une manière différente que le tout-venant du genre. C’est sans doute là sa principale réussite.

À noter qu’il semble que certaines éditions (y compris en poche chez 10/18 comme ici) aient bénéficié d’une intéressante postface d’Haruki Murakami. Ce n’est malheureusement pas le cas de la mienne… C’est aussi ça les achats en aveugle en occasion !

 

Les avis des lecteurs du Cercle d’Atuan : Vert, Lune, Cornwall, Nathalie, Rose.

Lire aussi les avis de Nébal, Tulisquoi, Papillon, Hélène, Manu, Xtase, Nefertari808

 

  
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